Il y a deux livres de la légende shinto : le Kojiki (Chronique des faits anciens) écrit en 712 et le Nihonshoki (Chroniques du Japon) écrit en 720. Ce sont des recueils, des chroniques, des arrêts sur image d’un mythe. Le Nihonshoki, au début au moins, raconte la même histoire que le Kojiki, mais avec une tournure déroutante de reviens en arrière, plus ou moins haut dans la ramification des alternatives. Il s’agit en fait d'œuvres de folkloristes, arrêtant la légende orale, comme le firent un millénaire après eux les frères Grimm. Le Kojiki est donc, comme un conte populaire, propice à l'interprétation, expression du plus indicible et du plus partagé, par ce qui fut érodé des centaines d'années durant, non seulement dans les temples mais le soir, sous le toit de paille gorgé de pluie, ou le jour à la rizière, le récitant en silence.
Écrit en japonais avec des caractères chinois, le Kojiki est non seulement le plus ancien, mais aussi le plus illisible des textes japonais. On peut en trouver de plus ou moins bonnes traductions françaises, le plus souvent elles-même traduites de l’anglais de Chamberlain de 1882.« Mon kojiki » sera la traduction anglaise de Gustav Heldt éditée en 2014 par l'unité de Columbia [Heldt, Gustav. 2014. The Kojiki: An Account of Ancient Matters. New York: Columbia University Press], relue et validée par ses pairs américains et japonais, intégrant le travail accompli par les précédentes traductions et des décennies de recherche sur ces textes et sur les premiers temps du Japon.
Izanami et Izanagi
Des six générations qui précèdent le couple Izanami - Izanagi, nous n’aurons à connaître qu’un kami (dieu) : Takamimusubi « le grand créateur», second des trois kamis de la création, le premier esprit manifesté. Septième génération des couples divins, Izanami et Izanagi sont les premiers kamis à descendre sur terre. Leurs nom signifient pour Izanami : celle qui invite (on retiendrait le “m” de femme) et pour Izanagi : celui qui invite (on retiendrait le “g” de garçon). Les noms japonais ont cela de beau que souvent ils ont un sens. Il sera donc question de qui invitera l’autre.
Les six premières générations de kamis donnèrent à Izanami et Izanagi la mission de descendre des Cieux pour façonner la terre. Du haut du pont flottant céleste, Izanagi plongea la pointe de sa divine lance dans l’océan et, en la relevant, projeta des concrétions de sel qui formèrent la première île du Japon. Ils descendirent et découvrirent un pilier sacré et un palais. Ils se décrivirent l’un à l’autre : son corps à elle était vide en un endroit, et à cet endroit son corps à lui avait quelque chose qui dépassait. Izanagi invita Izanami à s’unir pour donner naissance à la multitude du monde. Mais avant ils durent se séparer pour contourner le pilier, elle par la droite et lui par la gauche. Se retrouvant de l'autre côté, elle s’exclama : « Quel beau jeune-homme ! » De leurs deux premiers coïts naquirent une sangsue qu'ils abandonnèrent sur un canot fait de roseaux, puis une île d’écume. Déçus de leur descendance, ils demandèrent conseil aux kamis, là-haut. Les kamis consultèrent l'oracle des os brûlés, et la réponse fut simple : aucun bien ne viendrait du fait que la femme avait parlé la première. Ils redescendirent du paradis, firent à nouveau le tour du pilier et Izanagi parla le premier « Quelle belle jeune fille ! » Ils purent alors façonner la terre, donnant vie à la myriade des kamis de ce monde.
Après de nombreux coïts et de nombreuses naissances, naquit Kagutsuchi, l’esprit du feu. Izanagi, brûlée aux parties intimes, tomba malade, et mourut « de la mort d’un esprit ». Son corps fut porté dans le pays de Yomi, l’Outremonde. Izanagi, après avoir tranché Kagutsuchi en pièces, partit à la poursuite d'Izanami, decendant dans les galeries obscures de l'Outremonde. C'est elle qui vint à sa rencontre, restant cependant cachée dans l'ombre, derrière le seuil d'un palais. Il la supplia tendrement de le rejoindre. Si seulement il était venu plus tôt ! Izanami avait déjà mangé en ces terres et elle devait aller demander aux kamis de l’Outremonde la permission de repartir. Avant de s'éloigner elle le mit en garde, lui défendant strictement de la regarder. Mais elle partit longtemps, et l'attente devint insupportable. Incapable de résister à l'envie de revoir son amour, peut-être aussi par curiosité de ce qu'elle était devenue, ou pour s'assurer qu'il s'agissait bien d'Izanami, peut-être saisi par le doute, l'on ne sait pas, Izanagi brisa une large dent de son peigne (celui qu'il portait dans sa mèche de cheveux bouclant à gauche) qu'il changea en torche et, épiant les ténèbres, découvrit Izanami recouverte d’asticots se tortillant et rampant à l'intérieur et à l'extérieur de son corps, et des huit esprits de la foudre.
Izanagi prit peur et s'enfuit. Izanami, rendue furieuse par la honte de son époux, lança à sa poursuite les sorcières répugnantes. Izanagi défit les liens de vigne noire tenant sa puissante chevelure et les jeta : les liens se changèrent immédiatement en raisins de montagne et les sorcières s'arrêtèrent pour les dévorer. Mais cela ne fit que les ralentir avant qu'elles repartent à sa poursuite. Il saisit le peigne (celui qu'il portait dans sa mèche de cheveux bouclant à droite) et le jeta : le peigne se changea immédiatement en pousses de bambou et les sorcières s'arrêtèrent à nouveau pour les dévorer. Izanagi prit à nouveau la fuite mais Izanami lança à sa poursuite les huit esprits de la foudre escortés de mille-cinq-cents guerriers. Il continua de fuir, agitant son épée derrière lui, mais ils le poursuivirent. Parvenu au pied de la pente douce conduisant à l'Outremonde, il cueillit trois pêches qui poussaient à un arbre et, adoptant une posture menaçante, parvint à faire fuir ses assaillants. Izanagi honora les pêches du titre de " grandes et merveilleuses majestés sacrées " et leur demanda de venir en aide à tous les mortels qui rencontreraient la peine et la souffrance.
Izanami elle-même arriva. Alors Izanagi souleva un immense rocher qu'il aurait fallu mille hommes pour tirer, et avec ce rocher il boucha la porte de l'Outremonde. Izanami parla la première, lui promettant, s’il la quittait, d’étrangler chaque jour mille mortels. Izanagi lui répondit qu'alors il monterait chaque jour mille-cinq-cents huttes de naissance, et il la quitta.
Amaterasu et Susanoo
Immédiatement Izanagi alla se purifier dans les eaux, au pied d’un oranger. Après avoir, de ses ablutions, donné naissance à une vingtaine de kamis, il donna naissance à la huitième génération de kamis : nettoyant son œil gauche, il donna vie à Amaterasu, la déesse lumineuse des cieux (du titre de ôkami : haute kami) ; nettoyant son oeil droit, il donna vie à Tsukuyomi la déesse de la nuit; et de son nez il donna vie à Susanoo, le tumultueux kami de la terre. Amaterasu fut chargée de régner sur les Cieux tandis que Susanoo régnerait sur la terre.
Susanoo, en larmes, implora Izanagi de lui permettre de rejoindre sa mère dans l'Outremonde. Furieux, Izanagi le chassa. Susanoo monta aux Cieux et, le voyant arriver, Amaterasu se para de son arc et de centaines de flèches. Mais il lui promit que ses intentions étaient bonnes, qu'il était venu lui dire au-revoir. Elle refusa de le croire, mais il lui proposa de s'unir, ce qu'elle sembla ne pas pouvoir refuser. Ils s’unirent chastement, échangeant des objets, chacun de son côté de la rivière céleste. Izanami demanda à Susanoo son épée, elle la brisa en trois morceaux qu'elle plongea dans la rivière, donnant vie à trois kamis filles. Susanoo demanda à Amaterasu les colliers de pierres incurvées qu'elle portait en nœuds à ses cheveux et en bracelets à ses bras. Les croquant et les crachant, il donna vie à cinq kamis garçons. Mais Amaterasu revendiqua les cinq garçons qui étaient faits de ce qui lui appartenait, accordant à Susanoo les trois filles.
Furieux, Susanoo foula les rizières et recouvrit le palais de ses excréments. Amaterasu lui trouva cependant des excuses à ses outrages. Alors, à travers le toit de l'atelier de tissage des vêtements des prêtres, Susanoo jeta un poulain écorché à l'envers. La déesse des lissières, tissant avec une navette (un objet oblong), surprise et choquée, s'enfonça la navette dans le sexe et mourut. Amaterasu, furieuse, s'enfuit dans une caverne qu’elle scella d’un rocher qu'elle seule pouvait déplacer, plongeant les Cieux dans l'obscurité.
Les kamis, criant, furent proie aux calamités d'une nuit sans fin. Ils tentèrent par tous les moyens de faire sortir Amaterasu de sa grotte, que ce soit par des prières, par le chant de coq ou par divers rituels, mais rien n'y fit. Désespérés, ils s'en remirent à l’oracle d’une clavicule de cerf brûlé. L'oracle leur désigna un plan : ils déterrèrent un arbre, aux branches du haut ils accrochèrent des pendentifs, aux branches du milieu un miroir immense, et aux branches du bas des papiers de prière; un kami entonna des hymnes de prière, un autre se cacha à l’entrée de la caverne, et Amenouzume « la déesse couronnée des cieux » dansa devant le rocher. Amenouzumue, couronnée de branches de laurier et les bras cerclés de lianes de vigne, prit dans chaque main un bouquet de bambou séché et, sur un tonneau renversé à l’entrée de la caverne, frappa bruyamment. Elle devint possédée à sa musique, montrant ses seins et poussant sa ceinture sous ses parties intimes, faisant trembler les hautes plaines célestes du rire des myriades de kamis.
La clameur parvint à Amaterasu, à travers le rocher par lequel elle s'était séparée du monde. Intriguée, curieuse de ce qui se passait au dehors, elle ouvrit une fissure dans la fermeture de la caverne et, découvrant la danse d'Amenouzume, elle s'exclama ( trad. personnelle [Heldt 2014] ) :
« Car je m'étais cachée, les hautes plaines du paradis sont devenues obscures et le royaume central des plaines roseaux fut jeté dans l'ombre, en tout cas c'est ce que j'ai pensé. Pourquoi, alors, Amenouzume, la déesse couronnée des cieux, chante et danse-t-elle ? Et pourquoi les nombreux esprits dans leur multitude rient-ils tout haut ? »
Amenouzume répondit : « Nous rions et nous dansons car il y a un esprit ici qui est encore plus magnifique que vous, oh ma divine. »
Tandis qu' Amenouzume disait celà, deux kamis placèrent un miroir devant la fissure. Plus intriguée encore, Amaterasu rampa lentement au dehors vers sa semblance lumineuse. Alors le kami qui attendait, caché à l'entrée, la saisit par le poignet et la tira au dehors. Un autre kami brandit un lien, une corde sacrée dont les brins de paille finissaient vers le bas, et la tendant derrière Amaterasu, proclama : « Tu ne retourneras pas ici ! »
Amaterasu fit un pas en avant, illuminant les hautes plaines célestes de sa radiance.
[(trad. kamigakari) : est-ce que le mot apparaît dans le Kojiki ?]
Susanoo fut expulsé des Cieux. Il descendit là où se trouve aujourd'hui le grand temple Izumo, à l'ouest de la péninsule de Shimane. Voyant une baguette flotter sur une rivière, il remonta le courant jusqu'à tomber à al rencontre d'un couple de vieux et leur fille. Ils lui apprirent qu'un dragon à huit têtes avait dévoré leurs sept premières filles et que le dragon reviendrait bientôt leur dernière fille. Susanoo leur offrit de combattre le dragon en échange de la main de leur fille. Ils acceptèrent et l'aidèrent dans son stratagème : il leur fit brasser un saké huit fois pour qu’il soit fort, puis il leur en fit remplir huit tonneaux, il leur fit bâtir une palissade avec huit portes, et leur fit déposer un tonneau de saké devant chaque porte. Le dragon arriva et, enfonçant chacune de ses têtes dans une porte, but le saké avant de sombrer dans l’ivresse. Profitant de son sommeil, Susanoo le trancha en pièces jusqu’à ce que la rivière des esprits devienne rouge de sang. En coupant une queue du milieu, il brisa son épée. Intrigué, avec le tranchant brisé de sa lame, il ouvrit la queue en deux. Et là, dans les entrailles du dragon, il découvrit une magnifique épée qu'il saisit. Il alla retrouver Amaterasu et lui offrit la merveilleuse épée, accompagnée du récit de ses prouesses.
Le partage de la terre
(pour ne pas vous perdre, la partie du Kojiki qui suit a été résumée, omettant de nombreuses aventures et de nombreux noms de kamis pour aller à l'essentiel de la trame)
Okuninushi avait quatre-vingt frères et chacun d'entre eux désirait la même femme. Alors qu'ils parcouraient des rizières, les frères firent d'Okuninushi leur porteur et lui firent traverser un bras d'eau de mer. Selon le conseil de ses frères, il s'étendit au soleil pour sécher, mais sa peau se couvrit de brûlures et il manqua de mourir, mais les kamis de la mer lui vinrent en aide. Émue de la scène, la femme que tous ses frères désiraient promit de prendre Okuninushi pour époux. Fous de jalousie, ses frères le tuèrent. Il fut ressuscité par les kamis célestes, mais ses frères le tuèrent à nouveau, cette fois c'est sa mère qui le ressuscita. Poursuivi par ses quatre-vingt frères armés d'arcs et de flèches, il prit la fuite dans les profondeurs de l'Outremonde, devenu le royaume de Susanoo. Il y rencontra la fille de Susanoo et ils se promirent l'un à l'autre. Susanoo, faisant mine de l'accueillir, tenta de tuer Okuninushi dans son sommeil. Mais la fille de Susanoo puis une petite souris l'aidèrent. La fille de Susanoo fit manger à son père des pépins qui le plongèrent dans le sommeil. Avec Okuninushi ils attachèrent Susanoo par les cheveux, Okuninushi lui déroba son épée et son arc avant de bloquer l'entrée de la pièce avec un immense rocher. Lorsque Susanoo se réveilla, ils étaient déjà loin et ne put les rattraper. Alors Susanoo chargea Okuninushi de soumettre ses frères, armé de l'épée et de l'arc qu'il lui avait dérobé. C'est ainsi qu' Okuninushi prit possession de la terre.
Cependant, du haut des cieux, Amaterasu et Takamimusubi (le premier esprit manifesté), jugèrent qu'il était de leur droit de régner sur la terre. Ils envoyèrent en vain un premier, puis un second émissaire, avant de se décider à commencer par pacifier la terre en y envoyant deux kamis, l'un diplomate (Amenotoribune « le bateau oiseau du paradis ») et l'autre guerrier (Takemikazuchinoo « l'esprit courageux au puissant du tonnerre »). Okuninushi les reçut, mais il ne lui appartenait pas de répondre, c’était à son fils Kotoshironushi « le maître qui parle pour beaucoup d’autres » de les recevoir. Kotoshironushi était sorti pêcher et chasser au Cap de la plume (juste après l'actuel port de Mihonoseki, à l’est de la péninsule de Shimane). Le kami diplomate, Amenotoribune, lui fit sa demande et Kotoshironushi, se tournant vers son père, le pria d’offrir la terre à ces enfants d’esprits célestes.
« Aussitôt, il tapa du pied et renversa son bateau. Puis il frappa dans ses mains, les paumes inversées, en signe de soumission au ciel. Une clôture sacrée tissée de brins verts apparut et il se cacha à l'intérieur. »
Kotoshironushi avait un second fils qui refusa de céder la terre. Il affronta le kami guerrier, Takemikazuchinoo, et c’est sur le point de succomber qu’il accepta soumission et obéissance à la lignée céleste. Selon la décision de ses deux fils, Okuninushi céda la terre à la lignée céleste, promettant qu’aucun de ses cent quatre-vingt enfants ne se rebelleraient à deux conditions : qu’il lui soit bâti un temple avec des piliers profondément enfoncés dans la roche et un toit montant jusqu’aux cieux (temple d’Izumo, à l’ouest de la péninsule de Shimane) ; et que son fils Kotoshironushi soit choisi pour servir l'arrière-garde et l'avant-garde des forces célestes.
Amaterasu envoya son petit fils régner sur terre et, après lui avoir offert l'épée de Susanoo et le miroir avec lequel elle avait été tirée hors de sa caverne, elle lui dit :
« Ce miroir n’est rien de moins que le vaisseau de ma très haute âme. Révère-le comme si tu t'inclinais devant ma personne. »
Trois variations du Nihonshoki
Le Nihonshoki, écrit en 720, introduit de nombreuses variations dans le mythe recueilli huit ans plus tôt dans le Kojiki. De ces nombreuses variations, trois m’ont particulièrement intéressé et trouveront leur place dans la suite de cette étude. Traductions personnelles de [Nihongi, Chronicles of Japan from the Earliest Times to A.D. 697. Translated from the original Chinese and Japanese by W.G. Aston. London 1896]
La naissance d’Amaterasu
Izanagi dit : « Je souhaite procréer le précieux enfant qui devra régner sur le monde. Il prit alors dans sa main gauche un miroir de cuivre blanc, après quoi une divinité fut produite par ce miroir, appelée Amaterasu. »
La cause de la colère d’Amaterasu
« Quand il (Susanoo) vit qu'Amaterasu était dans son palais sacré de tissage, engagée dans le tissage des habits des kamis, il écorcha un poulain pie céleste, et brisant un trou dans les tuiles du toit du palais, le jeta à l'intérieur. Alarmée par la surprise, Amaterasu se blessa avec la navette de tissage. Indignée par cela, elle s’enfuit tout droit dans la caverne céleste, et y resta reclue. Alors la constante obscurité surgit de partout, et l'alternance du jour et de la nuit fut inconnue. »
Le partage de la terre
« Tous ceux qui se rebellaient contre son autorité (du kami guerrier) étaient mis à mort, tandis que ceux qui lui rendaient obédience étaient récompensés. Les chefs de ceux qui lui rendirent obédience étaient Okuninushi et Kotoshironushi. Alors ils rassemblèrent les quatre-vingt kamis sur la haute place du marché céleste, et les guidant aux Cieux avec eux, déclarèrent leur dévouement loyal. Alors Takamimusubi commanda Okuninushi, lui disant : « Si vous prenez pour épouse une des kamis de la terre, je devrai toujours considérer que votre cœur est désaffecté. Je vais à présent vous donner ma fille Mihotsuhime pour être votre épouse. Prenez avec vous les quatre vingt myriades de divinités pour être les gardes de mon auguste petit fils à tous ses âges. » »
Lisons ici le symbole. Susanoo, qui n'aspire qu'à rejoindre sa mère dans les profondeurs, par successions d'objets, par remontées inconscientes, causera le geste de la lissière et de la navette dans son sexe. Se rejoue la scène d'Izanami recevant Izanagi, donnant le dieu du feu qui la fera mourir « de la mort d'un esprit », peut-être la « petite mort » de l'orgasme, du feu dans son plus intime. La lissière, connaissant le plaisir, meurt de la mort d'un esprit et rejoint Izanami dans l'Outremonde, dans les profondeurs dont l'obscurité nous protège de leur dimension terrifiante.
Amaterasu, fille d'Izanagi, née de son oeil qui garde en lui la vue d'Izanami, ce regard dont il se nettoie est Amaterasu, elle porte en elle le regard, le refoulé de L'outremonde. Amaterasu ne peut supporter la vue de cette scène, comme Izanagi n'a pu supporter la vue d'Izanami déesse de L'outremonde. Amaterasu s'enferme dans une cave fermée par un rocher, là où Izanagi avait enfermé Izanagi dans L'outremonde avec un rocher.
Elle s’enfuit dans une caverne, à l'écart de notre monde. Une caverne, l'on peut imaginer, malgré elle, qu'elle est un peu, voire beaucoup, plongée dans l'Outremonde. Cependant un Outremonde fictif, car la caverne est taillée dans les Cieux. Amaterasu est la projection de l’esprit à travers le miroir, elle est de la dimension psychique, fantasmatique. Elle ne s’unit pas à Susanoo, séparés par la rivière céleste, ce n’est pas elle qu’il agresse, c’est la lissière qui se blesse avec la navette. Ce n’est pas le tunnel de l’Outremonde, c’est la caverne psychique, celle d’une retraite, d’une plongée en soi, à sa propre lumière, Amaterasu éclaire la caverne et découvre les dimensions cachées. Au dehors les Cieux sont privés de sa lumière, peu lui importe, elle est toute tournée en elle-même. Cette scène est du Kojiki celle qui relève le plus de la dimension psychique et d’un mécanisme du développement de soi.
Amaterasu est comme Izanagi, fuyant une réalité imprégnée de libido, elle met un rocher entre elle et cette réalité. Par réaction au dégoût et à la colère, la lumière rejette l'ombre et sa réalité. Mais l'issue de la séparation est différente. Amaterasu est apparemment passive, coupée du monde. Elle aussi condamnée par le rocher à l'obscurité, mais là où le masculin garde pour lui la liberté et se purifie de toutes sortes de façon, le féminin s'isole dans une apparente passivité. Comment Amaterasu décidera-t-elle de sortir de sa cave ? Amaterasu fuit la libido, par ce rocher que le monde entier ne pourrait déplacer, elle seule peut choisir de s'ouvrir au monde et toutes ses réalités.
"le monde", comprenons le, est du domaine de la psyché, tout comme la caverne. Ici le tabou le plus commun, celui du sexe, de la libido, à peine rencontré, est rejeté. Cette obscurité, ce monde privé d'Amaterasu, la lumière des cieux, est l'obscurité de la même psyché. Ce sont ici, dans le conte folklorique, l'expression d'un inconscient, celui non de l'auteur mais d'une myriade d'auteurs, gardant seulement le commun. Cette légende, cette expression de l'inconscient, des profondeurs insondables, exprimable seulement par la transposition, le récit. Le peuple tout entier a partagé le conte et c'est sa psyché qui s'exprime.
L'on ne sait rien des pensées d’Amaterasu dans la caverne, sinon qu'après des efforts renouvelés des kamis, demandant oracle aux hauts kamis, organiseront une danse qui fera rire l'immense assemblée des kamis. Que ces rires, cette clameur, parvenant à travers le rocher, intriguera Amaterasu. Curieuse de ce qui se passe au dehors, allant à son envie de savoir le pourquoi, la cause de la clameur. Allant à la connaissance du réel dans l'ombre, derrière le rocher par lequel elle s'était séparée du monde, dans l'obscurité qu'elle a fui, la plongeant dans plus d'obscurité encore. Amaterasu ouvre une fente dans la fermeture de la cave et découvre Amenouzume, « encore plus magnifique qu’elle »
Kotoshironushi est le père du peuple japonais, fidèle à Amaterasu et à sa lignée, celle des empereurs, héritiers du miroir qu'Amaterasu offrit à son petit-fils puis de génération en génération à la lignée impériale. Voici comment la fin a justifié les moyens et que le shinto est devenu une religion nationaliste. Elle est pourtant une expression accessible du plus profond de l'âme, joyau commun en chacun de nous. Des auteurs, soufis, gnostiques, des auteurs de tapisseries médiévales, aussi dans le miroir trouveront l'abord de l'âme.
Mihotsuhime, princesse, déesse, fille de Takamimusubi, s'unit à Kotoshironushi. Leur descendance, le peuple japonais, sera fidèle à la descendance d'Amaterasu. Mais il ne sera pas abandonné des cieux, il aura du divin en lui, transmis par la fille de Takamimusubi, deuxième manifestation de l'essence divine. Et ce lien divin est au féminin, la princesse, la déesse Mihotsuhime, aux radiances des premières expressions du principe divin.
Mihotsuhime peut se concevoir comme une alternative à Amaterasu, une voie populaire. Amaterasu est associée au miroir, véhicule de son âme. Il n'y a pas de miroir à Mihojinja. L'on trouvera au temple d'Ise le célèbre miroir d'Amaterasu, caché dans le temple réservé à la famille impériale. L'on trouve dans les temples japonais de nombreux miroirs, avec diverses fonction. J'ai même visité cet été le kawaijinja au sud de Kyoto, là le miroir est bien en évidence, nous adressant notre fidèle image. C'est le temple de la beauté où il est de coutume d'écrire un voeu au revers d'un faux miroir en bois et d'en faire offrande au temple. L'amie de Madoka, Miho, m'a conseillé de demander à être toujours jeune et beau, je lui ai répondu en riant que ce genre de choses n'existait pas, et je n'ai rien écrit sur le mien, le déposant en offrande.
« (Amenouzume) frappa bruyamment et devint possédée, montrant ses seins et poussant sa ceinture sous ses parties intimes. (...) Et les hautes pleines du paradis tremblèrent du rire des nombreux kamis dans leur multitude. »
Il est question de danse et de possession dans ce qui appelle Amaterasu hors de la caverne. Amenouzume est possédée par l'effet de sa propre musique, de sa propre danse. C'est Amenouzume qui parlera à Amaterasu à travers le rocher, lui disant peut-être la vérité, qu'elle lui a été préférée. Amaterasu, par le miroir, se reconnaît dans Amenouzume, elle va vers sa semblance, son double, sa projection de l'autre côté du miroir. Amaterasu se reconnaît dans l'ombre, elle se lie à elle allant vers son reflet. C'est rappelons nous une scène qui se joue dans la psyché, psyché en de milliers d'exemplaires, peuple auteur du mythe, le conte narrant les rouages de l'inconscient. Amaterasu se reconnaît dans l'ombre et l'accepte comme part intégrante d'elle-même. Jung verrait une individuation.
Ce fonctionnement du miroir est plus explicite avec Amaterasu selon une version du Nihonshoki : elle naît non pas d'Izanagi nettoyant son oeil gauche, mais d'Izanagi regardant dans un miroir de bronze blanc. Il y a un second miroir, celui de la scène de la cave, lorsqu' elle se reconnaît dans Amenouzume. C'est ce second miroir qu'elle offrira à son petit fils descendant conquérir notre monde, miroir qu'il doit vénérer, véhicule de l'âme d'Amaterasu. Amaterasu est dans le reflet, entre deux miroirs, intermédiaire avec l'essence incréée.
Après avoir donné naissance à une myriade de kamis en se purifiant de l’outremonde, Susanoo donne naissance à trois grands esprits : en purifiant son oeil gauche Amaterasu appellée à résigner sur le ciel, en purifiant son oeil droit xxx appelée à reigner sur la nuit et en purifiant son nez Susanoo sur les vastes pleines de “la mer à marée salée”. Le nom Susanoo signifie “homme téméraire, précipité et enragé”. Il ne fait que pleurer, si longtemps que lui passe une barbe longue de huit travers de main sous le torse. C’est parce qu’il veut rejoindre sa mère dans l'outremonde. Izanagi l’ expulse avant de se retirer. Avant de partir il monte aux cieux, Amaterasu se méfie de lui et défait ses cheveux et s’arme d’un arc et de nombreuses flèches. Susanoo lui dit simplement être venu lui dire au-revoir avant de s’exiler. Lorsqu'elle lui demanda une preuve de la pureté de ses intentions, il lui répondit : “ disons des serments sacrés et faisons des enfants”. Séparés par la rivière, elle brisa l’épée de Susanoo et en macha les diamants, les recrachant elle donna vie à cinq esprits féminins. Susanoo demanda à Amaterasu le pendentif transmis par Izanagi, il en macha les pierres et donna vie à trois esprits masculins. Comme les pierres lui appartenaient, Amaterasu revendiqua la parenté des esprits masculins. Susanoo entra dans une furie et mit à sac les rizières et couvrit les cieux de ses decrements. Amaterasu lui trouva des excuses. Alors, tandis qu’Amaterasu dirigeait le cérémonie de tissage des vêtements célestes, Susanoo fit un trou dans le toit et jeta au travers un poulain écorché de l’arrière vers l’avant. La lissière prise de panique mourut en s’enfonçant la navette dans les parties intimes. Amaterasu prit conscience de la méchanceté de Susanoo et s’enferma dans une grotte close par un rocher, privant les cieux de sa lumière.
Descendant sur la première île, concrétion du sel sur la lance divine, ils trouvèrent un gigantesque poteau, ils se décrirent mutuellement, elle avait un orifice là où il avait un appendice, il l’invita à s’accoupler et elle accepta, après avoir chacun contourné le poteau. Ils se perdirent de vue. “Quel bel homme !” s’écria-t-elle en le voyant “Quelle belle femme !” s’écria-t-il. Ils s’accouplèrent, donnant vie à une sangsue, ils s’en débarassèrent en le laissant flotter sur une petite barque de roseau, puis ils donnèrent vie à l’île d’écume. Déçus de leur descendance ils consultèrent les esprits célestes qui lurent l’oracle d’os de biche calcinés, c’est lui qui devait inviter le premier (les noms Izanami et Izanagi désignant respectivement celle et celui qui invite). Ils firent à nouveau le tour du poteau et se rencontrèrent à nouveau “Quelle belle femme !” dit-il “Quel bel homme !” dit-elle et ils donnèrent vie aux huit îles de l'archipel et aux kamis des éléments.
En même temps il eut cette vision de l’oubli, Izanami et Izanagi, chaque fois qu'ils quittent et se perdent de vue d’un côté et de l’autre du poteau sont frappés d’oubli et tout recommence, au premier jour. Ainsi c’est comme si jamais elle ne l’avait invité, comme si la sangsue et l’île d’écume n’avaient jamais existé, flottant cependant sur les flots, ne figurant pas à la liste des kamis, peut-être reviendraient-elles de nulle part, comes esprits du monde souterrain de Yomi.
Après avoir donné naissance à une myriade de kamis en se purifiant de l’outremonde, Izanagi donne naissance à trois grands esprits : en purifiant son oeil gauche Amaterasu appellée à résigner sur le ciel, en purifiant son oeil droit xxx appelée à reigner sur la nuit et en purifiant son nez Susanoo sur les vastes pleines de “la mer à marée salée”. Le nom Susanoo signifie “homme téméraire, précipité et enragé”. Il ne fait que pleurer, si longtemps que lui passe une barbe longue de huit travers de main sous le torse. C’est parce qu’il veut rejoindre sa mère dans l'outremonde. Izanagi l’ expulse avant de se retirer. Avant de partir il monte aux cieux, Amaterasu se méfie de lui et défait ses cheveux et s’arme d’un arc et de nombreuses flèches. Susanoo lui dit simplement être venu lui dire au-revoir avant de s’exiler. Lorsqu'elle lui demanda une preuve de la pureté de ses intentions, il lui répondit : “ disons des serments sacrés et faisons des enfants”. Séparés par la rivière, elle brisa l’épée de Susanoo et en macha les diamants, les recrachant elle donna vie à cinq esprits féminins. Susanoo demanda à Amaterasu le pendentif transmis par Izanagi, il en macha les pierres et donna vie à trois esprits masculins. Comme les pierres lui appartenaient, Amaterasu revendiqua la parenté des esprits masculins. Susanoo entra dans une furie et mit à sac les rizières et couvrit les cieux de ses decrements. Amaterasu lui trouva des excuses. Alors, tandis qu’Amaterasu dirigeait le cérémonie de tissage des vêtements célestes, Susanoo fit un trou dans le toit et jeta au travers un poulain écorché de l’arrière vers l’avant. La lissière prise de panique mourut en s’enfonçant la navette dans les parties intimes. Amaterasu prit conscience de la méchanceté de Susanoo et s’enferma dans une grotte close par un rocher, privant les cieux de sa lumière.
Les divinités se réunirent et s’en remirent aux oracles : ils rassemblèrent un coq, des prières, un arbre déraciné avec accrochés sur les branches du haut des pendentifs de pierres courbées et sur les branches du milieu un grand miroir. Xxx retourna un sceau et le frappant en rythme elle entra en transe et dansa, découvrant ses seins et baissant sa ceinture en dessous de ses parties intimes. Les divinités rièrent tant qu’Amaterasu fissura l’entrée pour voir quel spectacle pouvait distraire le monde pourtant assombri de son absence. Il lui fut répondu qu’ils avaient trouvé une divinité supérieure à elle et lui présentèrent son reflet dans le grand miroir. Intéressée elle s’avança et étant assez sortie elle fut tirée par le poignet et l'entrée fut scellée de cordes sacrées. Elle se réconcilia avec les kamis et Susanoo fut banni des cieux, on lui coupa la barbe et on lui arracha les ongles avant de l'envoyer sur terre, là où se trouve aujourd'hui le temple d’Izumo.
Amenouzume : sa nudité d’après Madoka n’est pas érotique. C’est inattendu, drôle. Comme dans tanpoko : après avoir réfléchi et établi une stratégie ils boivent et dansent, et le lendemain ils ont oublié la stratégie quand ils sont confrontés au problème. Ou alors ils pansaient l’avoir résolue.
Cete danse et la musique et le tous ensemble allant à leur clameur est typiquement japonais. Comme quand on se lâche après le travail. Les japonais aiment se lâcher. Donc la danse d’Amenouzume, peut-être sa nudité (était-elle belle ?, ce n’ets pas la même nudité), est dans cette tradition japonaise festive, de s’oublier.
Histoire de son grand oncle perdu dans la forêt en rentrant alors que le chemin est simple, a tourné en rond dans la nuit avant de comprendre que c’était Inari qui lui jouait un mauvais sort. Il s’est assis et a récité un soutra (Namou-abida-boudtsou) et en rouvrant les yeux il était à la sortie de la forêt (je pense que c’est l’histoire qu’il a raconté à sa femme, il s’était sûrement perdu, ivre)
Dans sous palais de l’Outremonde, à quelle lumière Izanagi voit-il Izanami ? A la lumière du peigne qu’il portait dans sa mèche de cheveux tournant à gauche. C’est à la vue de, et à la compréhension de, qu’Izanagi regarde à sa lumière, dans l’obscurité complète dans laquelle il est descendu, au seuil du palais d’Izanami, tâtonnant dans les ténèbres.
Pour s’imaginer son chemin je commenece par m’imaginer le contraire : il se retournerait et verrait une lueur lointaine, faible, ce serait le dehors qui le guiderait hors de la caverne, chaque pas qui ferait grandir cette lumière le conduirait vers elle. A la piscine ou à la mer, avez-vous déjà regardé la surface depuis les profondeurs ? Les bulles vont, oscillant vers la surface, ce sont des émanations de nous-même, cet air qui s’élève.
Izanagi va à sa vue, par degrés, vers de plus en plus obscurité, vers le plus absolu des noirs. Là se trouve le seuil d’un palais, Izanagi l’attend. Evoluant dans l’obscurité de l’Outrmonde, il peut aller au plus sombre, il peut aussi aller à d’autres sens, à l’odorat, au toucher, à l’ouïe, au goût même. A l’odorat, aux senteurs, allant à l’émanessence d’Izanagi, à ce qui se dégage d’elle, une moiteur et des senteurs imprégnées de l’Outremonde. A l’ouïe, allant au toujours plus obscur. Quels gémissements, quelles larmes, quels froissement, froissements de sa voix suivant une mélodie, de charmants mots en écho multipliés sur les parois des grottes et des palais de l’Outremonde. Le toucher de la froide pierre, Izanagi va-t-il vers le plus chaud ou vers le plus froid ? Quittant les plaines ensoleillées, certainement d’abord la grotte est sèche, puis elle se réchauffe approchant d’Izanagi. Mais c’est aussi la froideur du tombeau. Je ne sais pas, j’imagine qu’il va vers une chaleur croissante, car c’est Izanami morte de la mort d’un esprit, je pense de la petite mort de l’orgasme du dieu du feu.
Ce que désigne ce symbole, son partagé est un partagé de sensibles d’une certaine sensibilité. Rayonnements, gradiants dans la grotte, dans l’Outremonde, Izanagi sur le seuil de son palais, que j’éclaire d’un peigne, et ce peigne qui ne montre qu’elle à un lumière maladroite et laissant dansante les ombres pr une seule source lumineuses, grouiller les vers et les dieux de la foudre. De sa première vie, Izanagi aura connu le laid, le honteux. La confrontation première à l’ombre est laide, elle est dans le cercle tabou. Il est nécessaire de s’en détacher, de la mère, de la sœur, pour aller à la femme.
La lumière d’Amenouzume qui est lumière, sa danse est vue des kamis et ils rient, ils la voient aussi ils l’entendent, resplendissante, dansant à sa propre lumière, du tout profond d’elle-même, de son squelette et de son âme, par sa profonde présence. Amenouzume est lumière !
Mort n’est pas seulement préalable à la renaissance initiatique, il y a dans le gothique, le crâne, la fascination pour la jeune fille morte, la vampire de Théophile Gautier
Amaterasu et Izanagi, dans les ténèbres l’une de a caverne et l’autre de l’Outremonde, voient à leur propre lumière. Mais là où Izanagi voit brutalement, cruement, tout d’un coup, au dérobé, un interdit dont il ne pourra supporter la vue ; Amaterasu voit par degrés, par une fissure, elle rampe lentement au dehors. Izanagi est motivé par l’impatience, l’agacement. Dans le fond il ne songe pas à connaître Izanami telle qu’elle est devenue à sa mort, il souhaite la posséder, la retrouver comme avant, il n’est pas prêt à la moindre nouveauté, à la moindre altération. Amaterasu, certainement ennuyée dans sa caverne, est intriguée par les rires, elle est mue par la curiosité, la plus simple des envies, elle est curieuse et elle voit Amenouzume. Alors elles parlent :
« Car je m'étais cachée, les hautes plaines du paradis sont devenues obscures et le royaume central des plaines roseaux fut jeté dans l'ombre, en tout cas c'est ce que j'ai pensé. Pourquoi, alors, Amenouzume, la déesse couronnée des cieux, chante et danse-t-elle ? Et pourquoi les nombreux esprits dans leur multitude rient-ils tout haut ? »
Amenouzume répondit : « Nous rions et nous dansons car il y a un esprit ici qui est encore plus magnifique que vous, oh ma divine. »
Là où Amaterasu se reconnaîtra, Izanagi fuira devant la nouvelle Izanami, celle de l’Outremonde. L’ombre d’Amenouzume est bien de notre monde.
La lumière d’Ametrasu qui éclaire les cieux est-elle capable d’éclairer la caverne dans laquelle elle s’est enfermée, permet-elle de tout voir ici ? Dans cette réclusion, dans cette régression, Amaterasu est-elle en pleine connaissance, en pleine possession d’elle-même, ou a-t-elle une dimension qui reste irrémédiablement dans l’ombre, un espace invisible, qui reste inaccessible, impénétrable à sa lumière, une part d’ombre ? Et ce serait cette part d’ombre, au dehors de la caverne lumineuse, que complèterait Amenouzume, et l’assemblée des kamis, la danse sensuelle, la transe, la possession, les rires, et l’osmose.
Amaterasu s’accepte dans une décadence, une transe grave et lancinante nous conduisant dans l’intermédiaire, par la surface du miroir. Cet intermédiaire, fabuleux, et son reflet de notre monde, enchanté, c’est Amenouzume. Dans les manifestations de l’art, le véritable art, insignifiant, sans poids, un art qui n’est que geste, intention, ressenti. Mais si c’est pour ça ! Ce n’est que poussière, qu’or sur le bord du chemin.
Amaterasu simplement avait besoin du miroir pour le voir, elle avait besoin de connaître sa propre lumière pour creconnaître celle d’Amenouzume, d’ailleurs c’est introguée par les rires et la lumière d’Ammenouzume qu’elle a découverte très fissenement, par une fissure, elle a vu par une fissure Amenouzume et seule Almenouzume était visible. Amaterasu est dans sa caverne comme Izanami est dans lprofondeur de l’outremonde. Elle voit à sa propre lumière qui émane naturellement d’elle, là où Izanagi masculin s’y est mal pris, brutalement, sans la gradutaion nécessaire à comprendre, s’est confronté brutalement par sa raison, son cerveau, le peigne de la mèche gauche, côté du cpoteau où il est parti le pilier céleste de l’autre côté, le droit est celui d’Ianzami. La raison a été choquée. Amaterasu découvre par la fissure faible lumière révélant peu à peu Amenouzume. C’est après qu’il y aura miroir, quand elles auront parlé. D’avbors Amaterasu va à Amenousume. Pour sortir de la caverne elle est attirée sans bien comprendre par l’élan d’Amenouzume, puis elles vont parler, puis elle verra son portrait sur Amenouzume et elle ira, rampant vers son image, elle s’identifiera à Amenouzume et là rampant assez en avant, le masculin la saisira par les poignets la tirant au dehors et l’autre condamnera l’entrée de la caverne avec un sceau sacré. Plus jamais la caverne.
: la lumière qui resplendit dans les cieux, cette lumière, le soleil d’Izanami, éclaire-t-il dans la caverne ? Cela peut sembler évident, qu’Amaterasu est dans une caverne illuminée, qu’elle seule a la lumière. Et que le dehors est dans l’obscurité. Mais des réalités psyhciques, n’existe-t-il pas des lumières si obscures qu’elle ne renvoie pas de lumière, qu’elles ne font que chauffer à leur contact. Il est de ses noirs absorbant. Ce n’est pas la lumière de la Genèse de Saint Jean, que les ténèbres nn’ont pas arrêté. Il est dans l’Outremonde des ténèbre que nnulle lumière ne peut éclairer, nul netendemane, qui naura de faire même de la plus lumineuse des o-kamoô. La Caverne dans la quelle Amaterasu a fui, furieuse, effrayée surtout, de l’acte de Susanoo. Ce n’est pas la furie d’Izanami dans l’Outremonde. C’est la furie d’Amaterasu, la lumière, la pureté. Regarder ce que fait Susanoo, ce sera comprendre les ténèbres d’Amaterasu. Etrangement, elle s’est plongée dans la caverne, refusant le monde, dans une crise, elle s’est retirée, elle n’a plus voulu de rien. Rien. Pas m’êm Susanoo. Rien, dégoûtée absolument d’un monde dépourvu de sens. Elle s’est retirée dans le néant. Ce néant au début était vide. Il était plein de colère, de furie, d’incompréhension, de monde intérieur brutal et hostile. (pousse le on 26 :24). Il va se peupler, se conprendre, s’affirmer, se connaître. Et Amaterasu sera changée, elle quittera à jamais la caverne. Elle n’aur plus besoin de la caverne, elle aura acquis les ressources nécessaires pour aller au monde, vaste monde de l’altérité, de la différence, très riche et prolifère différence, nouveauté. Amaterasu est devenue curieuse avant tout, et elle a trouvé assouvissement à sa curiosité, la danse et la musique d’Amenouzume, partager le rire peut-être de la multitude des kamais, on ne nous le dit pas. Amenouzume ne dansera plus, peut-être anegdotiquement. Amaterasu aura en son regard Amenouzume puis Amenouzume portant son prtrait et autour l’assemblée des kamis dansant et riant avec elle.
Une danse de possession : telle est la danse d’Amenouzume, telle est la danse du kamigakari traditionnelle, et de ses différents modes de possession, la tradition des temples, il semble shinto et bouddhistes, étaient la danse de la miko. Dans le cas des mikos jeunes, à l’exemple d’une école de mikos aveugles les mekuros, l’initiation était rigoureuse, idéalement pré-pubères elles apprenaient les soutras et les rituels, le service. Elle étaient ensuite en retraite ascétique, et elle vivait leur premier kagura, illumination et possession à l’artifice de musique, de banquet, de contact d’un homme – un moine, et d’une sprit. Assurément Youna n’est pas de cette initiation. Peut-être pas même de ‘autre ! Elle est simplement Amenouzume. Cette miko donc, qui de caractère n’est pas Youna, c’est pour cela peut-être qu’il y a égarement, ce sont les mêmes dans l’intérieur, dans le reflètement de l’ême, mais ce ne sont pas les mêmes d’ambiance. Pourtant la transe de Youna n’est pas de cette transe brésilienne, elle a dans ses brèves paroles et dans ses redodaontes ascension qui j’amais ne s’arrêtent, de la conduite de l’âme, d’un intime, d’une mise à l’umière de l’âme, cristal qui guide d’élan le mix, la danse, le sourir, le regard, le tout entier consistant et cohérent de Youma « Time goes by…. Around you » (à l’instant), oui c’est de l’authenticité, et d’un lâcher prise dans une dimension tout à fait calculée, d’un DJ set ultra-appris ou d’un kagura précisément exécuté, dans sa fragilité, son public, son heure de live, deux performances stupéfiantes, et de transitoins, de ces marches arrière dans l’inconnu, de ces notes bleues.
La mythologie japonaise fut écrite au début du VIIIe siècle : deux livres le Kojiki et le Nihonshoki. Ils racontent tous les deux la même histoire, au début en tout cas, avant de devenir une chronique politique. Le Nihonshoki décline souvent deux, trois ou quatre versions du même événement. Les témoignages se multiplient, ajoutant à la véracité des faits. La façon dont le Nihonshoki décline les alternatives a du folklorisme, alors certainement différentes versions de ces histoires étaient racontées, comme les contes des frères Grimm.
Tel Orphée Izanagi descendra après elle et, pourtant mis en garde, il enfreindra l'interdit et allumant une dent de son peigne il verra la déesse des enfers.
Dans le Kojiki "Ce miroir n'est rien de moins que le vaisseau de ma merveilleuse âme. Révérez-le comme si vous révériez ma propre personne." ou dans le Nihonshoki "Alors Amaterasu prit dans sa main le précieux miroir, et, l'offrant à Ame no Oshihomimi no mikoto, dit une prière : "Mon enfant, quand vous regarderez sur ce miroir, qu'il soit comme si vous regardiez vers moi. Que vous le gardiez sur votre couche et dans votre salon, et qu'il vous soit un miroir sacré."
Susanoo émane du nez, de l’odorat, de l’inconscient profond souvenir, qui rappelle comme si le passé était présent. Avec lui se transmet l’essentiel d’Izanami de l’Outremonde, son obscurité inconsciente. Il a pour seul souhait de rejoindre Izanami, de remonter à la volupté des jouissances incessantes.
D'un oeil le jour, Amaterasu, de l'autre la nuit, elle agira, certainement, dans l'obscurité céleste. Peut-être même est-elle la jumelle céleste d'Aaterasu. Peut-être se rencontrent-eles dans la caverne, dans l'outremonde céleste.
Pourquoi Susanoo est-il furieux ? Parce qu’Amaterasu lui a pris les cinq garçons ? Ou parce qu’Amaterasu ne s’est pas vraiment unie à lui ? Parce qu’il n’a pas assouvi son appétit charnel ? Lui et Amaterasu ont procréé sans s’unir, sans les élans moites de l’Outremonde.
Intermédiaires Susanoo – Amaterasu : Parler des intermédiaires Susanoo => Amaterasu par le poulain dans le cercle sacré du tissage ; le geste de la lissière, « la mort d’un esprit ». De l’attrait de Susanoo pour l’Outremonde à l’interdit d’Amaterasu. Susanoo aspire à Izanami et Amaterasu se comporte comme l’a fait Izanagi : elle met un rocher entre elle et le monde, mais c’est le monde entier qu’elle rejette, la lissière avec, tout ce qui touche au monde, là où Izanagi a sauvé le monde avec lui. La déesse guidée par Amaterasu dans l’entremêlement du tissage est détournée de sa tâche par Susanoo qui brutalement la conduit au plaisir de la chair, à « la mort d’un esprit », la jouissance. Dans l’enclos sacré du tissage, Amaterasu la supervise, elle tisse les kimonos sacrés, outils de la matérialisation de divin.
Les intermédiaires sont les lents glissements de l’inconscient, intermédiaires des choses intérieures.
Ce que voit Amaterasu par la fissure : elle voit son propre reflet se mêlant à la déesse plus magnifique encore qu’elle-même, certainement la danse ne cesse pas, le rire ne cesse pas, les esprits des hauts cieux dansent et rient, secoués par la danse sensuelle, la nudité possédée de sa propre musique, de son intérieur, de sa propre clameur. Nue, Amenozume danse dans les ténèbres et la multitude des kamis danse avec elle. La possession d’Amenouzume se propage parmi les plaines du paradis et prend possession des esprits.
Est-ce que es kamis peuvent voir la danse d’Amenouzume ? Peut-être qu’elle est lumineuse. Peut-etre qu’il s’agit des autres sens ?
Amaterasu se reconnait dans cette magnificence. Elle se faufile lentement, attirée hors de la cave. Elle rampe au dehors.
Amaterasu est surprise, elle est tenue au dehors. Elle est intriguée, sans jalousie elle désire connaître les rires et la danse, elle désire et ouvre une fissure dans le rocher. Elle se découvre mêlée à la danse possédée, nue, l’envie de la chair et non la chair. Amaterasu se reconnaît dans la femme possédée de sa propre musique, sans pudeur de ses seins, de son vagin, sans pudeur elle se reconnaît, elle se projette. Elle s’est reconnue.
Changement d’Amaterasu :
Le changement d’Amaterasu vient-il du dehors, de la danse et des rires des kamis ? Ou s’est-il opéré en silence, devenu propice à s’ouvrir à ces rires et à la danse ?
Imaginez la femme frottant au sol dans la fissure du rocher. Elle se laissera tirer par la main, elle laissera sceller la caverne, car elle y consent, elle accepte d’être conduite, d’agir selon d’autres volontés, confiante et il s’agit en effet ici des souhaits de l’oracle.
Amaterasu se reconnaît dans le monde, c’est la vue de la navette, c’est aussi le reste tout le reste et surtout, les autres.
Le souhait de l’oracle est une intervention qui la dépasse. Amaterasu, enfantée de la vue d’Izanami par Izanagi, n’est pas de pleine pureté, à présent c’est son œil qui est souillé de la vue de la navette maniée par Susanoo, pénétrant les parties intimes de la lissière. Et où ? Dans ce palais intérieur où elle est enfermée, cherchant dans la complexité des entremêlements répétés, tels des soutras ou des prières, les kimonos rituels, la manifestation des prêtres, intermédiaires agissant du sacré. Quel besoin a-t-elle de prêtres ? Amaterasu est née de l’œil d’Izanagi, œil marqué par le reflet d’Izanami de l’outre monde, à présent déesse de l’Outremonde. Amaterasu reconnaît sa dualité de la puritanité d’Izanagi et des jouissances de la chair d’Izanami. Elle s’est refusée à s’accoupler à Susanoo. A présent, saisissant la mort de l’esprit, ce qu’il a projeté dans son œil, dans sa pensée, dans ce qui lui donna vie, elle se plongera dans la réclusion et changera, reconnaissant sa part obscure.
L’inconscient n’apparaît pas, il se découvre, il était déjà là. Amaterasu ne fut jamais si pure, regard d’Izanagi se purifiant, portant en lui la vue d’Izanami déesse de l’Outremonde. Mais c’est aussi une larme, une nostalgie, l’autre Izanami, celle qui lui avait préexisté, celle avec qui il avait descendu le pont XXX, ils s’étaient aimés et ensemble ils avaient donné forme au monde dans sa multitude.
Amaterasu prive le monde de sa lumière, mais surtout elle se prive du monde, ce monde qui s’appréhende par les sens. Elle est dans le monde de sa pensée, insensoriel, agissant dans la caverne. Dans cette caverne se manifestent sa propre lumière, selon sa seule envie, selon son seul désir, Amaterasu se transforme.
Ce monde privé de lumière, cet obscur monde dans lequel Amenouzume se met à danser, possédée par sa propre musique, est le même monde qu’Amaterasu connut baigné de sa lumière. Et il suffit de lumière et tout redevient comme avant, inaltéré. Amatareasu reconnaît que l’ombre est part intégrante de la multiplicité des états de l’âme. Ici n’est pas brutalité mais volupté de danse et d’attirante nudité. Possédée par sa musique intérieure. Amaterasu se reconnaît et se connaît, son visage se projetant sur le corps nu dansant, éclairé par sa propre lumière.
Sur la danse d’Amenouzume :
Volonté sensuelle, émanant telle l’extase de l’intérieur, sans intermédiaire, sans langage, sans leçon, l’extase est sans tradition, elle se traduit par la puissante influence, par le puissant désir de plus né d’un rythme accélérant, une danse frénétique. L’extase transposée d’Amaterasu est une connaissance véritable d’elle-même, elle est une reconnaissance.
Sur les miroirs :
Sur le miroir du Nihonshoki : intéressant dans l’idée qu’Amaterasu est entre deux miroirs, dans l’espace du reflet.
Qu’Amaterasu naisse d’un miroir dans la version du Nihonshoki n’est qu’un indice, une confirmation : il est question d’une image transposée, de la vision d’Izanami qui s’est agrégée dans l’œil, dans l’esprit d’Izanami et qui la projette en Amaterasu qui en deviendra le vecteur d’une progression, sur le fil du développement psychique. Le second miroir aussi est inutile, l’artéfact est inutile, l’important étant qu’Amaterasu se reconnaisse en Amenouzume.
La reconnaissance reste dans le miroir, Amaterasu étant dans le miroir, ce qui se voit dedans, son autre monde, sans lieu, céleste, utopos. La reconnaissance est un potentiel. Avec, en lien mais pas entièrement lui, la reconnaissance de sa dimension obscure.
Le regard d'Izanagi est Toucher. La liaison dans se lier d'Isanoo et Amaterasu est Odorat. La pénétration de la lissière avec la navette est Ouïe. La réclusion d'Amaterasu est Désir. Je m'en tiendrai là pour l'instant, à savoir si la reconnaissance d'Amaterasu est de Désir ou de Goût, et de savoir si Vue peut se retrouver ici. Je vois bien en tout cas le commun chemin des quatre premières Tapisseries. Il n'y pas de hasard, il y a symbole lorsqu'il y a un sens. Ce schéma, mieux qu’individuation, serait une reconnaissance du principe féminin.
Quelle suite donnera Amaterasu ? Le féminin élèvera-t-il le masculin ? L'union d'Amaterasu est l'alternative à l'échec de Mélusine, par une réincarnation du féminin. Qu'adviendra-t-il ensuite ? De Susanoo et de la huitième fille promise au dragon à huit têtes ? N'est-ce pas là la succession au nombre sept de Désir ? Un cycle de sept s'achève, et qu'est-ce qui suit ? Quel renouvellement ? Et Vue est-elle dans le geste d'Amaterasu offrant son miroir à son petit-fils ? Autant dire à l'humanité.
Ce ne sera pas dire des Tapisseries qu'elles expliquent tout, mais qu'elles aident à comprendre, elles nous font suivre un cheminement, elles nous enseigneront un schéma. Un schéma qui n'a pas encore vraiment de nom, dont un moment du chemin est l'individuation comme dit Jung, ou nous dirons reconnaissance. Un chemin intrinsèque au psychisme sur le chemin du spirituel, que l'étude des Tapisseries montre, et qui s'applique certainement à d'immenses grandeurs qui demandent à avoir en soi le chemin, comme une carte, vers des territoires de plus en plus riches et complexes, vers les expériences de nos propres vies. Alors, sachant reconnaître, nous verrons que la carte n’aura pas été l’immensité de la forêt, elle n’aura été qu’un mot.
Le miroir est l'interface par laquelle le divin prend vie en notre monde. Du regard actif, créant et découvrant, repensant les alentours, et mieux encore par une interface. Amaterasu est dans l'envers du miroir, dans cet autre monde qui apparaît de l'autre côté et qui continue d'exister une fois le miroir parti.
Amaterasu est de l'autre côté du miroir tenu de main de dieu, et elle est de l'autre côté du miroir tenu de main d'homme. Amaterasu est l'intermédiaire, entre deux miroirs, elle est née du regard, de la pensée d'un dieu et la regardant, elle nous guide. Nous remontons dans l'expérience de la pensée divine, celle d'un dieu séparé de sa femme enfermée aux enfers. C'est la pensée de cet Izanagi, ce souvenir, la larme de ce souvenir qui habite le regard projetant au dehors, de l'autre côté du miroir, Amaterasu, et de la femme des ténèbres naîtra la femme solaire.
N'est-ce pas fascinant ce jour d'enfance où l'on comprend qu'il n'y a rien de l'autre côté du miroir ? Que malgré sa profondeur il est si fin, posé sur un mur. Dans mon cas c'était plus fou encore puisque de l'autre côté c'était la salle de bain de mes parents, presque identique reflet avec le miroir aux mêmes dimensions. Le miroir dans sa réalité est un nul part, un non-lieu (un u-topos). Dans sa pensée et dans sa spiritualité il est pourtant infini, et il nous invite à ressentir la réalité de cet envers, de jouer avec les reflets pour tester son réel.
Izanagi va à sa vue, par degrés, vers de plus en plus obscurité, vers le plus absolu des noirs. Là se trouve le seuil d’un palais, Izanagi l’attend. Evoluant dans l’obscurité de l’Outrmonde, il peut aller au plus sombre, il peut aussi aller à d’autres sens, à l’odorat, au toucher, à l’ouïe, au goût même. A l’odorant, aux senteurs, allant à l’émanessence d’Izanagi, à ce qui se dégache d’elle, une moiteur et des senteurs imprégnées de l’Outremonde. A l’ouïe, allant au toujours plus obscure. Quels gémissements, quelles larmes, quels froissement, froissements de sa voix suivant une mélodie, de charmants mots en écho multipliés sur les parois des grottes et des palais de l’Outremonde. Le toucher de la froide pierre, Izanagi va-t-il vers le plus chaud ou vers le plus froid ? Quittant les plaines ensoleillées, certainement d’abord la grotte est sèche, puis elle se réchauffe approchant d’Izanagi. Mais c’est aussi la froideur du tombeau. Je ne sais pas, j’imagine qu’il va vers une chaleur croissante, car c’est Izanami morte de la mort d’un esprit, je pense de la petite mort de l’orgasme du dieu du feu.
La pente douce vers l'Outremonde :
Les pêches éloignent les esprits de la foudre et les guerriers, aussi elles apaisent les douleurs du corps et les souffrances de l’esprit, les tourments. Dans la tourmente et la détresse, il est bon de se laisser glisser ici, confiant que les pêches nous aiderons à revenir.
Schéma : Izanami – Amenouzume - Amaterasu
Amenouzume est dans le contretent, en alternances entre Amaterasu et Izanami, Lumière et Ombre. Et de tout ça, de tout ce sacré, il est mieux de rire, il faut profiter, sourire, danser bêtement, follement, l’appréciant comme l’or qui est dans poussière du chemin. En Youna c’est Amenouzume qui danse et mix, elle ne dit pas de nos mots, de nos histoires, elle dit brut, sans langage, allant au plus constant, au plus ressenti, à l’identité de ce besoin, qu’elle réfraîchit pleinement, entièrement, d’amour, de joie, de sensualité, de technique, de transe, de perte de contrôle, d’oubli de l’ici et de l’invocation de souvenirs ancestraux. Elle n’est peut-être pas déesse, ni la femme divine, mais n’est-elle pas princesse, couronnée, son un piédestal, elle est l'altesse.
C’est le spirituel, la pureté, qui d’abord Izanagi choqué rejette Izanami derrière le rocher. C’est ensuite sa prolongation, son esprit, qui se prolonge par Amaterasu, première création du regard d’Izanagi. Il créera aussi la lune entre les deux, de son autre œil, de son autre regard, de son inconscient. Puis Susanoo, violent, aspirant à rejoindre sa mère, salement, dans l’Outremonde. Il fera croire à Amaterasu à un amour véritable, pur, échangeant par la rivière divine. Mais il la trompera et violera la lissière céleste. Elle se retirera dans sa caverne. C’est l’intermédiaire, la lumière de la lune, empêchant les véritables ténèbres (car l’on ne savait pas autre part que chez les Arabes que la Lune reflétait le Soleil). C’est Amenouzume dansant à la Lune, nue, reflétant les rayons pris en bribes sur sa peau, son regard, surtout ses gestes, sa danse, son être, se propageant aux kamis dans ce qu’il a de superficiel, de distraction. Amaterasu verra le vrai, la dynamique. Par une fissure combien de sa lumière laissera-t-elle transparaître ? Ele verra la vraie Amenouzume, puis elle lui parlera, dans cette véritable vue à la curiosité fait suite la compréhension, la réflexion, avant d’avancer, rampant, avançant prudemment par prudence mais aussi parce que le rocher est lourd et étroit. Et elle ira vers le miroir.
Est-ce une questiond e se voir elle-même ? Ou est-ce le miroir en symbole ? Le regard mystique. C’est par l’union de l’érotisme, mais pas seulement, un érotisme dansant, elle n’est pas tout à fait nu, mais elle montre sa chatte, et c’est bon. Elle va vers la femme nue et c’est bon. Elle mêlera à la femme nue le miroir mystique. C’est ainsi qu’elle aime l’extérieur. Elle s’unira ensuite à nouveau, au plus haut kami, et aura sa véritable descendance. L’anima initiée, véritable, pour le rationnel, le lion, sera de l’autre côté du miroir. Et ce n’est pas lui seul qui est de lautre côté, mais son double mystique, uni à la licorne. Licorne à la quelle le lion avait été initié sur la tapisserie précédente, celle de Goût.
née de son œil gauche dans le Kojiki, et dans la seconde version du Nihngi, née d'un miroir : "Le mikoto Izanagi dit : "Je souhaiterais procréer l'enfant précieux qui devra régner sur le monde." Il prit alors dans sa main gauche un miroir de cuivre blanc, sur lequel une divinité fut produite, appelée Amaterasu no ookami."
et alors qu'elle s'avance, rampant dans la fissure, remontant la lumière, Ame no Tajikaraou la saisit par la main et l'entrée de la grotte est scellée
• Le couple premier oublie son identité, il se retrouve de l'autre côté du pilier, comme frappé d'amnésie. Elle l'invite, telle Lilith, ils donnent naissance au vampire (la sangsue) qu'ils laissent aller à la mer sur une barque de roseaux, et à une île d'écume (non-lieu). Ils ne les reconnaitront pas comme leurs enfants.
• Le couple seconde, tout autant frappé d'amnésie, sera celui de l'homme dominant la femme, Adam et Eve. Sur les eaux de leur monde dériveront le vampire et le non-lieu.
• Le coït incessant des dieux, l'orgasme, la torride pénétration, créeront le jeune homme du feu brûlant et le vieil homme du feu périssant. Orgasme et assombrissement post-coïtal. Izanami sombre, Izanami mort de la vie d'un esprit et elle est conduite dans le monde souterrain, situé dans les Montagnes du tribunal des esprits, à la frontière du Pays des nuages flottant et du Pays de la mère chêne. C'est là, sur les cimes, à la frontière de la brume flottant sur les feuillages. C'est ici que se situe l'entrée de l'Underworld, c'est dans ce contact que s'ouvre la porte sur l'Underworld.
• Morte de la mort des esprits, elle a en fait basculé dans l'Underworld par une fente dans notre monde. Ici elle devient répudiante à notre vue, elle nous voit mais nous ne pouvons la voir. La transgression de l'interdit, à la différence de Mésuline ou de La femme des neiges, ne la fera pas fuir, elle la mettra en furie, jetant sur nous les sorcières, les sept esprits de la foudre, mille cinq cent soldats, et elle-même pour finir. Quelle différence avec Eurydice ! C'est lui qui fuit ! Il ne peut supporter ce qu'Izanami est en train de devenir, consumée par le feu. Il la refoulera derrière un immense rocher avant de se purifier. Revenons sur les noms : Izanami deviendra Grand esprit de l'Underworld, Grand esprit du chemin de la poursuite. Le rocher est le Grand esprit de la route du retrait et le Grand esprit obstruant l'Underworld, sur la douce pente conduisant dans l'Underworld. Izanami n'était pas prêt, il n'a pas tenu, il a fui, condamnant volontairement Izanami à l'Underworld. Elle n'aura eu de cesse de le menacer de toutes sortes de mauvais esprits, finissant par le menacer elle-même. Il sera sauvé par la fuite et le dénuement, abandonnant la lannière dans es cheveux, son peigne, agitant son épée sans chercher à fendre l'ennemi, tenant en ses mains les pêches, qu'ils consacreront à ceux dans la douleur et la souffrance. Le premier ailleurs est celui de la fuite et de l'abandon de soi. Izanagi n'est pas prêt, Izanami est trop sombre. La seconde union est un échec.
Quelle est cette relation Kotoshironushi / Mihotsuhime ?
Le mythe veut que l'homme invite la femme, cf premier oracle. Avant deux fois la femme avait invité l'homme : avant et après qu'ils se séparent devant le pilier. La prmière fois, la naturelle, la céleste, celle d'avant un oubli terrestre, de l'autre côté du pateau, est la femme qui invite l'homme, la femme qui désire.
Dans Koto - Miho quel est l'équilibre ? La princesse est offerte au kami terrestre pour qu'il se soumette aux kamis célestes. Elle lui est offerte en échange d'une soumission. Cet homme se comportera vertueusement pour la princesse, pas seulement sa princesse, mais la princesse sans lui aussi, sans lui avant tout. Il y a un déséquilibre du sacré. Sera-t-il rétabli ? Mihitsuhime est l'altesse. Enfants de Kotoshironushi, elle est notre altesse. Que désire-t-elle ?
La miko est la chef d'orchestre du tambour et de la flûte. Les deux connaissent l'air qui va être joué, comme s'ils partageaient la pensée, ils partagent un savooir, un avenir commun. Aussi une sérénité de ne pas avoir où se diriger. Mais périlleuse est la danse, et la musique avec des aigus intenables et des entre-notes. La suite est connue mais il y a énormément de concentration et de préparation, l'ambiance est grave et solennelle. Il n'est pourtant pas question de prouesse, il est question de raisonner et que la cheffe d'orchetre soit également la danseuse, dirigeant et excéutant la danse et la danse influe les grelots. De cet enlacement, de ce déroulement perpétuel emmenant avec lui la flûte et le tambour, se fait comme un tourbillon, comme une aspiration. A ce mouvement s'ajoute l'alternance de lumière et d'ombre, d'avancées et de reculs, un contretent qui étire l'attraction, l'appel de la possession.
La mythologie japonaise fut écrite au début du VIIIe siècle : deux livres le Kojiki et le Nihonshoki. Ils racontent tous les deux la même histoire, au début en tout cas, avant de devenir une chronique politique. Le Nihonshoki décline souvent deux, trois ou quatre versions du même événement. Les témoignages se multiplient, ajoutant à la véracité des faits. La façon dont le Nihonshoki décline les alternatives a du folklorisme, alors certainement différentes versions de ces histoires étaient racontées, comme les contes des frères Grimm.
Le premier homme, après que sa femme eut donné naissance au monde, procrée seul, et c'est la déesse la plus haute. Il y a à réfléchir sur ces deux Adam et Eve et la signification de leur aventure. Le miroir est l'interface par laquelle le divin prend vie en notre monde. Du regard actif, créant et découvrant, repensant les alentours, et mieux encore par une interface. Amaterasu est dans l'envers du miroir, dans cet autre monde qui apparaît de l'autre côté et qui continue d'exister une fois le miroir parti.
Le second miroir est celui de l'épisode de la grotte : furieuse contre son frère Susanoo, Amaterasu s'est enfermée dans une grotte, privant le monde de sa lumière. Pour la faire sortir, les dieux ont un plan surprenant : Amaterasu, curieuse des rires causés par la danse d'Usume, se penche au dehors et se voyant dans le miroir de huit mains, elle croit qu'elle a été remplacée par une déesse plus magnifique qu'elle-même et alors qu'elle s'avance, Ame no Tajikaraou la saisit par la main et l'entrée de la grotte est scellée. Ce second miroir paraît une seconde fois : Amaterasu l'offre à son petit-fils Mimi descendant sur terre (lui-même remontera au ciel et offrira le miroir à son fils qui descendra pour de bon) : Dans le Kojiki "Ce miroir n'est rien de moins que le vaisseau de ma merveilleuse âme. Révérez-le comme si vous révériez ma propre personne." ou dans le Nihonshoki "Alors Amaterasu prit dans sa main le précieux miroir, et, l'offrant à Ame no Oshihomimi no mikoto, dit une prière : "Mon enfant, quand vous regarderez sur ce miroir, qu'il soit comme si vous regardiez vers moi. Que vous le gardiez sur votre couche et dans votre salon, et qu'il vous soit un miroir sacré." Amaterasu est de l'autre côté du miroir tenu de main de dieu, et elle est de l'autre côté du miroir tenu de main d'homme. Amaterasu est l'intermédiaire, entre deux miroirs, elle est née du regard, de la pensée d'un dieu et la regardant, elle nous guide.
N'est-ce pas fascinant ce jour d'enfance où l'on comprend qu'il n'y a rien de l'autre côté du miroir ? Que malgré sa profondeur il est si fin, posé sur un mur. Dans mon cas c'était plus fou encore puisque de l'autre côté c'était la salle de bain de mes parents, presque identique reflet avec le miroir aux mêmes dimensions. Le miroir dans sa réalité est un nul part, un non-lieu (un u-topos). Dans sa pensée et dans sa spiritualité il est pourtant infini, et il nous invite à ressentir la réalité de cet envers, de jouer avec les reflets pour tester son réel. On pourrait dire du miroir d'Amaterasu la déesse solaire qu'il nous illumine, mais non, c'est à nous de nous plonger dans la contemplation du miroir, et de cet effort de regard nous verrons Amaterasu comme Izanagi l'a regardée. Nous remontons dans l'expérience de la pensée divine, celle d'un dieu séparé de sa femme enfermée aux enfers. C'est la pensée de cet Izanagi, ce souvenir, la larme de ce souvenir qui habite le regard projetant au dehors, de l'autre côté du miroir, Amaterasu, et de la femme des ténèbres naîtra la femme céleste. N'est-ce pas la dualité de la femme divine ? Et Amaterasu furieuse contre son frère nous privera de sa lumière. Miroir, stupéfiant miroir.
Amenouzume, dans la nuit céleste, au claire de lune certainement, est de l'obscurité céleste. Elle est de l'outremonde céleste. Elle est à l'équilibre céleste, tenant d'Izanami, sans sa brutalité, juste séduction, fantaisie, suivie de rires et de peu importes.