Premier souvenir
J'avais entre mes bras un ours en peluche, c'était à la crèche. J'aidû le laisser car un autre enfant l'avait maintenant. On m'a expliqué qu'il n'était pas à moi cet ours, que je pouvais le demander gentiment, mais c'était inutile. Elles n'ont pas compris, elles ne pouvaient pas voir mon amour et ma tristesse, ma déception et le souvenir en moi. Elles ne pouvaient pas et j'ai souffert plus encore que ce soit si invisible en moi.
J'ai été dans le dortoir, au bas d'un lit à étage, je m'en souviens tant. J'avais à l'esprit l'ours, derrière la porte, dans la section. Il est de ce monde, certainement différent de l'ours que j'avais eu. J'avais l'image pleine de larmes d'un nounours d’amour. Le lien à cette densité inouïe de réconfort était lui-même réconfort. Sous le lit à étage, j'étais stupéfait de l'intensité de ce lien triste et réconfortant, de la chaleur d'un ailleurs, de l'ours que j'avais connu, de ce déchirement au travers duquel j'étais maintenant et dans le passé, qu'il y avait là une métamorphose du monde.
Ce premier souvenir que je décris aujourd'hui avec un autre bagage, se lit en nostalgie gnostique. C'est fascinant que ce soit mon premier souvenir. Aimant dans ce lien et ses semblables d'autres choses métamorphosées, je suis cet étrange personnel qui a grandi tant bien que mal dans le monde. C'est dans ce lien que j'aime, que j'espère aimer aussi, c'est certainement par là que je suis maladroit dans le monde. Si maladroit.
Partant du hasard
Monsieur Delhomme, mon professeur de lettres en classe de troisième, m'avait conseillé d'écrire tous les soirs quelques lignes, tous les soirs, comme un exercice, parce que j'avais une facilité avec l'écriture. Je n'ai presque rien écrit ainsi. Si, ce soir, ne sachant quoi écrire, je suis retombé sur ce souvenir. Généralement j'écris quand je me sens porté. Il m'est aussi arrivé de me sentir porté après avoir commencé comme ça, on verra ce qui en sera ce soir. Ce sera, quoi qu'il en soit, un exercice d'écriture à la plume : sans autre relecture que l'orthographe, que je m'apprête à effectuer. Qui lira ? Qu'en pensera-t-il ? Quel sera l'analecte de ces pensées ? Essayons de ne pas y songer.
Le plus facile dans ces instants est de dire ce qui me passe par la tête, d'évoquer des souvenirs et de les commenter : là ce serait L'analecte de mes ombres, recueil de mon ami très cher Anthony Bruguier-Jourdan. J'ai du mal à le lire, il me manque du vocabulaire, dernièrement j'ai commencé à y arriver : il semble qu'il faut accepter d'être promené par la main, sans faire marche arrière, sans s'arrêter pour se construire l'image poétique proposée par le poète, comme je le fais avec Rimbaud, Yeats ou Rilke ; mais de me laisser aller à ce fil, quitte à la fin à reprendre depuis le début. Du moins c'est mon impression.
Anthony m'a offert le recueil de Mallarmé, j'ai compris qu'il se revendique de lui, Jamais un coup de dés n'abolira le hasard. Rien que le titre je ne le comprends pas, ou alors je repense à Boris Vian et sa lecture pataphysique de Tant va la cruche à l'eau qu'à la fin elle casse. Un coup de dés : le lancer de dés introduit le hasard. Comment pourrait-il l'abolir ? Soit ce titre est une évidence, un fait, oui, jamais un coup de dés n'abolira le hasard, comme on dirait que le ciel sera bleu, que jamais une fourmi n'écrasera un éléphant ou que jamais ce qui est plus froid ne montera juste parce qu'il est plus froid. Jamais un coup de dés n'abolit le hasard, jamais un coup de dés n'a aboli le hasard, et par répétition, non jamais de l'humanité un coup de dés n'a aboli le hasard. Il est donc assez répété et logique que jamais il ne l'a aboli, qu'il est inimaginable qu'il l'abolisse, donc que non, un coup de dés jamais n'abolira le hasard.
Ou il n'est pas question du dés, mais du coup. Le dés qui roule certes roule au hasard. Mais il est question du coup, du lancé. Un savoir lancer bien particulier saurait-il vaincre le hasard, faisant rouler de certaine façon à faire un six ? Il paraît qu'il existe des dés pipés et qu'il existe même avec des dés sains, d'excellents lanceurs qui savent y faire des six à tous les coups. Il paraît même que le diable sait particulièrement bien y faire avec les dés. Alors, il y a bien des coups de dés sans hasard.
Problème : est-il question que le hasard soit aboli sur ce coup de dés ? Ou alors qu'un coup de dés tue le hasard ? Que pour toujours tous les coups de dés, toutes les pièces qui tournent et les toupies de hanuka, ne soient plus sous l'effet du hasard ? Comment tourneraient-ils alors ? Dés roulants et pièces tournantes, toupies lettrées ? Reviendraient-ils à leur position de départ ? ou à leur position de préférence ? Auraient-ils une volonté et ils nous l'exprimeraient par leur face ? Quelque volonté alors pénètrerait non le lancer mais le tourner ? La toupie ne vient pas là par hasard, surtout celle de hanukah : car de cette hsitoire de fête juive, si l'on demande où est Dieu dans l'histoire, l'on vous répondra qu'il était dans le hasard.
Un coup de dés bien particulier saurait-il faire résonner la fin du monde ? Le départ de Dieu de la matière, la démystification et la science absolue des gestes et des tensions tendineuses dans un lancer puis des rebonds sur le tapis vert, en chaos jusque là, que tout soit si bien compris et prémédité ? Que nous serions dans un monde de machines, sans surprises. Je préfère qu'il y ait un Dieu dans ce monde, je le souhaite, et je le prouve, chaque fois que je lance un dés et que je me trompe.
22
Tiens donc, 22... En voulant modifier la taille des caractères du titre de cette section, j'ai tapé 22. J'ai dû taper au lieu de sélectionner car il y a 24 et 18 mais que 22 est mieux en proportion du 16 du texte.
Avec ce que je viens d'écrire, je ne peux que rester dans le thème : là plusieurs choses me viennent sur un 22 écrit en taille de caractère 22. La question qui me tiendra jusqu'au lendemain en relecture, est celle-ci : Y a-t-il un hasard ?
La dernière fois qu'une faute de frappe a produit du sens, c'est dans Je viens de tout perdre. Je venais d'effacer plus d'une heure d'écriture : j'écrivais directement dans mon terrier, mon site internet, j'avais effacé tout le bloc de texte par de mauvaises manipulations de texte (leçon tirée, mettre à jour le site régulièrement : fait à l'instant). Je devais écrire sur la Vierge et Sophia, la première présence auprès de Dieu ineffable, non révélé, la shekina, et à la fin je voulais citer certains passages du Livre des Proverbes. Le découpant comme du papier Bible, sans bien comprendre comment, tout avait disparu. Rien n'y fit pour le récupérer, ni Ctrl+Z, ni la flêche arrière sur la barre du haut, ni le chargement des sauvegardes automatiques du site. Alors j'ai tout réécrit de souvenir.
Il y a pour la seconde fois dans ce 22 en 22 (chiffre 22 écrit en dimenion de caractère 22), du hasard comme il peut s'introduire dans un texte que l'on tape. C'est suffisament intriguant pour s'examiner. Dans le premier cas il m'a été question d'oubli et de nostalgie, sans être question, quand je le regarde maintenant, de punition. Il y a de l'oubli dans les perspectives de l'ineffable, avec le pressentiment de savoir, de ressentir l'affinité, la Reconnaissance.
De l'arithmosophie je ne connais qu'un peu de la symbolique du 2 et du 4. 2 n'est pas le divin de l'Un, l'incréé, il est la première manifestation détenant en son couple tous les potentiels de création : Adam et Eve, ombre et lumière, bien et mal. 4 est l'équilibre, l'orientation quardinale : les quatre pieds d'une table, les quatre points cardinaux ; les quatre éléments et les quatre vents sont la structure divine en la nature ; les quatre Evangiles, eux, ont été choisis, n'oublions pas les Apocryphes.
Alors ? Que dire des 2 et des 4 si ce n'est là l'ordre créé par Dieu. C'est certainement beaucoup, mais je ne sais pas d'un seul coup. Oui, ordre et hasard... si, oui. C'est joli que ça vienne de m'arriver, cherchant Dieu dans un lancer de dés, que l'ordre divin arrive sur le tapis.
Additionant 22 et 22 : 44, 2+2+2+2 : 8 Multipliant 2x2x2x2 = (2+2) x (2+2) = 16. Qu'en dit le dictionnaire des symboles Chevalier ? Je partage ces quelques notes :
« Huit est universellement le nombre de l'équilibre cosmique. C'est le nombre des directions cardinales, auquel s'ajute celui des directions intermédiaires ; le nombre de la rose des vents, de la Tour des Vents athénienne. C'est souvent le nombre des rayons de la roue, de la rouelle celtique à la Roue de la Loi Bouddhique. C'est celui des pétales du lotus et des sentiers de la Voie. C'est celui des trigrammes du Yi-king et des piliers du Ming-t'ang ; celui des anges porteurs du Trône céleste ; celui aussi - sans qu'on sache exatement sous quelle forme - du miroir d'Amaterasu. (...) , l'octogone, ont aussi une valeur de médiation entre le carré et le cercle, entre la Terre et le Ciel, et sont donc en rapport avec le monde intermédiaire.
(iconique hindoue...) Ce symbolisme de l'équilibre central, qui est aussi celui de la Justice, se retrouve, notons-le encore, dans l'ogodoade pythagoricienne et gnostique (BHAB, BENA, GIC, GUES, HERS).
(huit shinto : innombrable sacré, n'est pas l'innombrable indéfini et dispersé ; c'est l'innombrable constituant une entité qui s'exprime par le huit)
(huit des Dogons d'Afrique, puis les quechuas)
La tradition chrétienne, en ce qui concerne ce nombre, recoupe étonnament celle des Dogons, en faisant du huit un achèvement, une complétude. Selon St Augustin, toute action, en cette vie, se rapporte au chiffre 4, ou encore à l'âme dont le nombre est ternaire. Au-delà du 7e jour, vient le 8e qui marque la vie des justes et la condamnation des impies. [à mon goût un peu vilain ce St Augustin]
Quant au Huitième Jour, succédant aux six jours de la Création et au Sabbat, il est symbole de résurrection, de transfiguration, annonce l'ère future éternelle : il comporte non seulement la résurrection du Christ, mais celle de l'homme. Si le chiffre 7 est surtout le nombre de l'Ancien Testament, le 8 correspond au Nouveau. Il annonce la béatitude du siècle futur dans un autre monde.
Rappelons pour terminer que le signe mathématique de l'infini est un huit couché, et que la lame huit du tarot est la justice, symbole de complétude totalisante et d'équilibre, ce qui rejoint parafaitement le huit = quatre + quatre des Dogons. »
« Seize (Maison-Dieu [16e arcane du tarot de Marseille], Szvastika, Quatre)
Carré de quatre, ce nombre indique l'accomplissement de la puissance matérielle. Comme tel, il prend aussi une signification morale périlleuse, par une exaltation d'orgueil, une volonté de puissance non contrôlée : Jacob de Bohëme désigne par ce nombre l'abîme, opposé au Nirvana.
Si, d'autre part, on considère qu'il est le double de huit, il devient la multiplication pour l'être des cycles de vicissitude et de renaissance, ou (ALLN, 364), ou bien le redoublement de la huitième Séphire de la Kabbale : Hod, la splandeur, la gloire (FRCH, 158), ce qui n'est point non plus une situation de tout repos. »
Il n'y a pas 44 dans le Chevalier. Alors le quarante que j'ai déjà présenté pour les Tapisseries sur lesquelles figurent un total de quarante lapins. Ce n'est pas le nombre que j'ai le plus manipulé par la suite, alors reprenons : « le nombre de l’attente, de la préparation, de l’épreuve ou du châtiment. (…) ce nombre marque l’accomplissement d’un cycle, d’un cycle toutefois qui doit aboutir, non pas à une simple répétition, mais à un changement radical, un passage à un autre ordre d’action et de vie. » Avec le nombre quarante, les Tapisseries sont placées sur le Panthéon spirituel, par le nombre de la maturité, les quarante jours et quarante nuits de Moïse sur le Mont Sinaï, les quarante jours qui suivent la Résurrection, les quarante ans de Mahomet recevant la Révélation, ou les quarante ans de Bouddha commençant à prêcher. » et s'y ajoute le quaternaire structurant.
Voilà, on en tirera les conclusions que l'on voudra. Aussi qu'actuellement je tape en taille 16.
22 ! Vl'la les flics ! On s'fait la malle ! The End ? Non : il y a 20 et 22 dans le Chevalier
« Vingt
(Maya : Dieu Solaire, Homme Parfait, chiffre sacralisé, puis 400. Rites de purification des indiens Hopis de l'Arizona au vingtième jour de la naissance : L'enfant ne devient donc une personne, selon cette tradition, qu'après avoir quatre fois accompli le cycle de cinq jours, qui exprime cosmologiquement les quatre directions cardinales et le centre, lieu de la manifestation) »
« Vingt-Deux
Ce nombre symboliserait la manifestation de l'être dans sa diversité et dans son histoire... c'est-à-dire dans l'espace et dans le temps. Il totalise, en effet, les 22 lettres qui, selon la Kabbale, expriment l'univers : trois lettres fondamentales, les équivalents de l'Alpha, de l'Oméga et du M, qui sont les figures archétypales ; sept lettres doubles, correspondant au monde intelligible intermédiaire ; douze lettres simples correspondant au monde sensible. Il s'agit, bien entendu, dans cette doctrine, des lettres hébraïques mais elles ont leurs analogues dans le hiératique égyptien, le phénicien, l'éthiopien, etc. (ALLN, 371).
Mais, c'est aux anciens Parsis (ibid. 371) que remonterait cette interprétation de 22 comme symbole de toutes les formes naturelles et de toute l'histoire de la créature. L'Avesta était composé de livres en 22 chapitres ; le recueil des prières de 22 prières. L'Apocalypse attribuée à St Jean compte aussi 22 chapitres. D'autre part, les arcanes majeurs du tarot sont au nombre de 22.
Dans une tradition peule, 220 signifie très longtemps. Ce nombre aurait une signification secrète, d'ordre sacrificiel et initiatique (HAMK, 45).
Ce nombre joue un rôle important dans la pensée symbolique des Dogons et des Bambaras, dont toutes les connaissances mystiques sont recouvertes par le symbolisme des vingt-deux premiers nombres, 22 représente le total du temps écoulé, du début de la création à l'achèvement de l'organisation du monde. Il est la conclusion de l'oeuvre du créateur, le terme des paroles, le chiffre de l'Univers (DIEB). »
Un beau cadeau que me fait le hasard en nombres : ) Et puis pourquoi 22 m'a-t-il plu, je l'ai invoqué en le tapant dans la case, l'imposant là où le traitement de texte m'imposait le 24 ou le 18 ? Il est tard, et tout cela mérite relecture.
Si, avant de clore : savez-vous quel passage du Livre des Proverbes avait tant d’importance ? Connaissez-vous son nombre ?
8:22 L'Éternel m'a créée la première de ses œuvres, Avant ses œuvres les plus anciennes.
(parle la Sagesse, la shekinah, la première auprès du trône divin, Sophia, Yeat's Rose of the world)
Y revenant plus tard
Huit est l'équilibre cosmique, central. Aussi symbole de transfiguration, il annonce la béatitude de l'autre monde.
Vingt-deux est l'entièreté d'une vie dans son histoire et dans son corps, avec en lui les trois degrés de l'être, les trois degrés de lettres de la Kabbale - trois lettres du monde fondamental, sept lettres du monde de l'intermédiaire, douze lettres du monde sensible.
Seize est l'accomplissement de la puissance matérielle, une forme d'exaltation de l'orgueil, forme d'abîme de Jacob de Boëhme. Il est aussi le redoublement de la huitième Séphire - Hod - celle de la structure logique.
Quarante-quatre est l'équilibre menant à la transformation spirituelle.
Deux est l'univers des possibles du couple premier. Quatre est l'équilibre cardinal. Huit est l'équilibre cosmique et la promesse de la troisième Alliance. Vingt-deux est la totalité de l'être dans son corps, sa pensée et son âme. Seize est l'excès de la raison. Quarante-quatre est l'équilibre de la maturation spirituelle.
Les sommes (2+2+2+2, 22 + 22) comme les parties (2, 22) sont l'étendue des potentiels (2), l'équilibre cardinal (4), l'équilibre spirituel (8) et l'entièreté de l'être, dans la sérénité de la maturation spirituelle (44), aspirant à la troisième Alliance.
Le produit (2x2x2x2 = 16) est l'excés néfaste de la raison. Son 6 a du 6 du lancer de dés, celui qui cherche à abolir le hasard, celui qui par la raison tente de remplacer Dieu.
Morale de l'histoire ? Croire, se laisser humblement guider par l'équilibre du monde, sans prétendre relancer les dés.
Altesse
Se laisser humblement guider par l'équilibre du monde, sans prétendre relancer les dés.
Aller à la mélodie du monde. J'écris, écoutant Because des Beattles, Children, don't get weary par Judy Clay, la playlist.
J'y ai pensé aujourd'hui, dans la queue à la cafétéria et en allant chercher les enfants. Une courte journée trop pleine, en permanence en retard. J'ai pensé tout à l'heure à la shekinah. Première présence auprès de l'Essence, avant toute création. Dans 22:8 elle est la raison, la sagesse, qui comble les hommes, la véritable vertu de vérité.
Sophia, dans le mythe de La Pistis Sophia, aussi présence féminine avant la création. Mais les Cieux sont déjà plus peuplés, elle est plus éloignée de l'Essence, s'en approchant, allant franchir au delà des éons, la ligne du Plérôme, le domaine de l'Essence, elle échoue et un dieu de matière crée ce monde de la création, avec nous pauvres hommes. Sophia subit les sévices des archontes et de ses larmes naissent nos âmes. Jésus descendant sur terre la libèrera.
La morale du Livre du Proverbes et de La Pistis Sophia diffèrent, des religions différente : le judaïsme et le gnosticisme. Le nom sagesse importe moins que l'identification à la première présence auprès de l'Essence : la shekinah, Sophia. Elle est un intermédiaire avec la création, elle est entre les deux dieux, l'Essence et son démiurge, son reflet d'en-bas. Elle restera l'intermédiaire, l'Altesse, entre l'Essence et le reflet, intermédiaire, elle fonctionne en miroir.
La Vierge est l'intermédiaire divin, le theotokos, mère de Dieu. Elle sera la mère aimant son enfant, elle le consolera, elle l'encouragera, elle encouragera son premier miracle aux noces de Cana, puis elle s'estompera, le laissant à sa vie de prophète, jusqu'à sa mort, elle sera là, sur le mont du crâne (Golgotha). Elle sera l'entièreté d'une vie de Jésus, intermédiaire de l'Essence à l'existence, plus belle qu'un démiruge. Jésus ne naît pas de cette mauvaise terre, il naît de l'immaculée conception.
Et ensuite ? La myriade d'âmes appelle la lumière de l'Essence. Elle était là à la naissance et à la mort de Jésus. A la résurrection, ce sera Marie-Madeleine « Le premier jour de la semaine, Marie-Madeleine se rend au tombeau de grand matin ; c’était encore les ténèbres ». Le premier jour de la semaine, ou le huitième jour, le premier apôtre voit et il croit.
Et nous ? De cette aventure céleste rappelant aux Cieux nos plus précieux intermédiaires, qu'espérons-nous ? Nous ont-ils abandonnés ? Jésus appelera l'Esprit saint, une seconde fois après notre baptême. Et pourtant nos âmes sont si obscures. Elles vibrent quelque peu aux vents qui battent le désert, elles s'égarent, touchant autour d'elles dans les ténèbres, ne sachant ce qu'elles cherchent.
Celle qui détient le mystère de la transfiguration de l'Essence, c'est elle, la Vierge Marie, c'est aussi Sophia intermédiaire entre l'Essence et l'archonte, et ses larmes, c'est la chekinah et sa sagesse. L'intermédiaire féminin de la manifestation des trois religions du Père, du Fils, et du Saint Esprit.
J'ai l'impression que d'un coup tout s'explique : la gnose est la spiritualité de celui ou de celle qui souhaite rencontrer Dieu de son vivant. Ce n'est pas prière de la Vierge Marie pour qu'elle intercède auprès du Père. C'est Hélène, la femme de Simon. C'est elle, la dyade, la chambre nuptiale de l'Evangile de Philippe. L'union est le cœur de la gnose. La femme est l'intermédiaire divin.
Voilà une phrase qui sortirait volontiers de son contexte. La femme est le féminin, l'anima, la part féminine de l'être. Elle est le couple, elle est aussi le reflet, l'envers de soi. Elle est Abelone.
Elle est dans la danse, Amenouzume couronnée dansant à sa propre musique. Elle est dans les larmes, Rose de ce monde, première auprès du trône céleste, pour qui Il fit la terre un chemin d'herbe sous ses pieds errant. Elle est Isis, ressuscitant Osiris chaque nuit. Elle est aimée, vénérée, elle est tout, tout comme Silvia. Elle est Ellen, réconciliation avec le monstre, Sophia se libérant vers le Plérôme sans l'aide d'un quelconque Jésus : initiée à sa propre musique. Elle est la dame de Vue, nous liant à elle nous basculons dans l'envers du miroir, dans un reflet du lien de l'amour elle est l'e centre autour duquel nous tournoyons, franchissant la surface du miroir, qui mine de rien, nous retient du monde intermédiaire : l'envers du miroir. C'est par elle que s'opère la bascule d'une existence en une autre, de l'ici à l'intermédiaire, l'u-topos.
Elle a son cadre liturgique : musique et poésie, larmes et nostalgie, résonances et à l'envers, elle est volupté et délassement, elle est amour et désir, elle est la mère et la femme. Elle est un hymne répondant à notre appel, la liste est longue, en voici quelques exemples, et c'est aussi la musique de l'âme, j'ai essayé d'en parsemer le site, Catalina Vicens, Les pêcheurs de perles, la lecture de Rose of the world, il en est tant, nul besoin de les collectioner, simplement d'aller pleinement à l'un et c'est cette main qui vous guide, c'est elle cette main de la mélodie du monde.
« Tu sei tutto, lo sai che tu sei tutto, everything. Tu sei la prima donna del primo giorno della creazione, sei la madre, la sorella, l’amante, l’amica, l’angelo, il diavolo, la terra, la casa… ah, ecco che cosa sei, la casa… » (« Tu es tout, sais-tu que tu es tout ? Everything. Tu es la première femme du premier jour de la création, tu es la mère, la sœur, l’amante, l’amie, l’ange, le diable, la terre, la demeure, ah voilà ce que tu es, la demeure… »)
C’est un cri à l’aide plein de larmes qu’elle entend lorsqu’elle répète « It is a strange world ». Elle lui répond qu’elle a eu un rêve, elle aussi, un rêve dans lequel le monde était dans les ténèbres, car il n’y avait pas de rouges-gorges, mais les rouges-gorges arrivèrent, nombreux, émanant l’amour et la lumière sur ce strange world. Des rouges-gorges d’amour et de lumière, « the only thing that would make a difference, and it did ». Jeffrey la contemple, pleine de lumière et de grâce, il ne pleure plus, il sourit, « You are a neat girl, Sandy ».
« Were you there with me ? »
« Car je suis la première et la dernière.
Je suis l’honorée et la méprisée.
Je suis la prostituée et la sainte.
Je suis l’épouse et la vierge.
Je suis la mère et la fille.
Je suis les bras de ma mère.
Je suis la stérile, et nombreux sont mes fils.
Je suis la magnifiquement mariée et la célibataire.
Je suis celle qui donne le jour et celle qui n’a pas procréé.
Je suis la consolation des douleurs de l’enfantement.
Je suis l’épouse et l’époux, et c’est mon mari qui m’a engendrée.
Je suis la mère de mon père.
Je suis la sœur de mon mari et il est mon fils rejeté.
Respectez-moi toujours.
Car je suis la scandaleuse et la magnifique. »
« Femme et altesse : certes nous offensons souvent
un destin de femme que nous n'entendons pas.
Vous nous considérez comme pas encore mûrs
pour votre vie qui, si nous l'effleurons,
devient licorne, farouche bête blanche
qui s'enfuit... et sa peur est si grande
que vous-mêmes ne la retrouverez
/ s'évanouissant en sa sveltesse /
qu'après bien des mélancolies,
craintive encore, chaude et hors d'haleine.
Et vous restez à ses côtés, loin de nous, - et douces
passent vos mains sur le clavier des tâches quotidiennes ;
avec humilité vous servent les objets,
mais vous ne voulez voir qu'un seul vœu exaucé :
que la licorne un jour, découvre son image
apaisée dans le miroir de votre âme. »
Altesse
"Who dreamed that beauty passes like a dream ?
For theses red lips, with all their mournful pride,
Mournful that no new wonder may betide,
Troy passed away in one hight funeral gleam,
And Usna's children died.
We and the labouring world are passaing by :
Amid men's souls, that waver and give place
Like the pale waters in their wintry race,
Under the passaing stars, foam of the sky,
Lives on this lonely face.
Bow down, archangels, in your dim abode :
Before you were, or any hearts to beat,
Weary and kind one lingered by His seat ;
He made the world to be a grassy road
Before her wandering feet. »
Et si j'écrivais ici
Ce serait folie
Pure folie
Ce serait ne pas pénétrer dans l'ouverture,
Revenant sur mes pas
Faisant refus devant l'obstacle
Ecrivant ici je ne suis pas fait de ce qui précède,
Je suis bien dessous
Même si dans le temps je lui succède
Je suis avant elle, sans sa perfection de l'indicible
Aller avec ce qui précède c'est être dans l'ineffable,
Sans écriture de cet ici
L'ineffable que je m'en souvienne, où était-il ?
Le monde a été hanté d'angoisses, sombres angoisses, mésinterprétations du monde, me pliant à leur regard
Quel ineffable ? L'ai-je approché l'ineffable ?
Tout ce dont je me souvienne est le métro passant sur la scène,
Son pont de métal, et en bas le cerisier, aujourd'hui vert
Et sa poésie, écrite pensant à Rilke que je lisais dans ce wagon
Voyageant en moi
Je le vois,
En ambiances à la surface de l'eau
Ce qui se voit véritablement en portraits et en gestes
Est hanté d'angoisse à présent que j'écris
C'est la moins belle vie
Heureusement sont là
Mes enfants et Madoka, ma joie
La lumière, de son blanc reflet,
Sur la Seine en iris
Je ne sais comment
Elle est ancrée en moi
Je ne sais me souvenir quand je l'ai pensé
Il n'y a pas assez d'instants où j'eus à l'esprit ce qui est là
Il s'est pensé je crois dans la nuit et son sommeil
Et quelques bribes émanant au jour
En poésie
Les miroitements sur la Seine naîssent de là
De ce qui s'empourpre dans Rose of the world (Yeats)
Qui monte en magesté dans La Dame à la Licorne (Rilke)
Qui est en six états distincts dans les tapisseries
Successions de magesté
L'aimant en son réel
L'immuable
Car de la répétition des scènes et des ambiances
C'est le constant qui reste
Sur la superposition
Imaginez reposant tournées les unes sur les autres des feuilles de papier
Elles sont en pétales autour de leur coeur
Imaginez à présent une lumière derrière
La rose de papier serait lumineuse sur les côtés, là où le papier est fin
Et sombre au milieu où les couches de papier empêcheraient la lumière
A la différence superposez des feuilles de lumière
Le centre serait d'une éblouissante lumière, au centre du centre
Superposant en la vie les angoisses, le coeur de la vie, la constante est ce cercle noir, ténébreux
Superposant les lumières, c'est une élévation en la lumière
C'est ainsi, par forme de superpositions de lumière qu'est
La lumière blanche s'irisant sur la Seine
Elle a en elle de toutes ces lumières
Vécues et imaginées
Toutes ensemble, feuilles de lumière
Voiles magiques
Elles ne sont pas toutes à la fois dans mon souvenir,
Mais elles importent peu
Je suis attiré par leur coeur, leur lumière,
Elle qui ne se dit pas
« reste ici »
Sois ici, dans le reflet,
même en mon absence
sois là quelque part en moi
en mon âme endormie
Etrange n'est-elle pas ?
Ame qui dort le jour et vit la nuit
Elle perce parfois dans le jour
Merveilleuse, indicible
En des instants
En eux-même non tout pleins de lumière
Mais plus ou moins subtilement couverts d'un voile de l'umière
Il est des instants sous le voile sombre, et il en est sous ce voile de lumière
Ensemble, laissant empruntes l'un derrière l'autre, de leur lumière
Feuilles de lumières et leur centre éblouissant
Ce passage quotidien en métro, les photos du cerisier, les péniches allant sur l'eau, le poème écrit, les Lettres de Rilke, toutes ces feuilles, ces voiles de lumière, captés en la poussière, simple poussière, captée dans un filet de lumière, très fin, confondu en la lumière du jour, elle lumière de la nuit, du sommeil, ce voile si fin
Inconsciemment il alimente une source intérieure
Coulant ainsi qu'un canal,
En les eaux tumulutueuses du fleuve
Seine, Seine de lumière, ville
Anhydre, Anhydre sans eau, ailleurs
Pas n'importe où hors de ce monde
u-topos, là en la ville Amaurote
La ville où l'on ne voit pas
Amaurote est la chambre noire
Elle est le silencieux studio
Qui n'étouffe pas la lumière de la nuit
Là se déposent les voiles
Délicats, intouchés par la lumière rouge
Allant en eux-mêmes
Dépôts fragiles
Se développent de leurs images
Très fine feuille perdue en poussière, n'est-ce ses fibres se ramifiant
Se superposent, et là quelque part, paraît une lumière, là où elles se recoupent
L'image, détaillée de ses souvenirs
Elle a été de la tristesse et de la joie
Elle a été de choses et leurs contraires
Dans leur entrelac fin
Dessinant le contretent
La spirale
Perçant en l'infinie nostalgie
Et sa voie de lumière, au centre des feuilles de papier lumineuses
Feuilles de lumière
Ou incurvées, fragments d'une coupole polarisante
Fragments multiples et distincts
Recevant toutes entières les images
Mais là ce qui en reste au centre du centre des réflexions,
Seule la lumière
De ces différents jours, de ces différents climats
De ces différents films et de ces différents livres, de ces différentes musiques
Eclectiques
De Sophia, d'Isis, d'Hélène, de la Vierge, de la Shekinah, d'Athéna, des six visages des tapisseries, d'Amenouzume, d'Ellen, de la Majesté, de l'Altesse
J'y pense écrivant ce paragraphe : l'application du schéma Dieu - Shekinah, Essence - Sophia, Dieu - Vierge ; sur Amaterasu - Amenouzume fonctionne en Déesse, ce n'est pas le même schéma. C'est Amaterasu + Amenozume, pas une distance de pôles opposés qui créent de la fécondité des inverses. C'est une addition : le voile lumière de l'une s'ajoute à celui de l'autre, c'est une reconnaissance d'appartenance au Soi, c'est une réconciliation, une consolation. Ils restent loins de nous, Takamimusubi, Izanagi, Suzanoo, Okuninushi. Elle est auprès de nous, Mihotsuhime, elle danse avec nous, Amenouzume, elle est notre lumière, Amaterasu, elle est nos ténèbres, Izanami.
Les Tapisseries, elles, six dames, elle est l'éblouissement de l'aurore de Toucher, les voeux illusoires d'Odorat, la consolante mélancolie d'Ouïe, l'épurement de Désir, l'équilibre aux différents degrés de Goût, la superposition des voiles de lumière de chacune des cinq précédentes tapisseries, par-dessus la scène émerveillée de la dame le regard mi-clos, en transparence, présente à la licorne un miroir. Elle ne lui présente pas son reflet. Elle lui présente un miroir.
Qu'y voit la licorne ? Nous la voyons dans le miroir, c'est qu'elle nous voit. Elle nous regarde.
Nous sommes le reflet de la licorne.
Ou est-ce elle qui est notre reflet, dans le miroir présenté par la dame ?
La scène nous élève en elle-même, à travers le miroir, simplement en incarnant notre propre reflet, conscience de la cause interne, de la propre volonté, dans les gestes qui semblent d'abord inagencés, mais auquel l'on s'habitue. Les gestes gauches du reflet.
Ne marche-t-il pas étrangement celui qui pense au moindre de ses muscles et de ses équilibres ? Celui-là tombe
Il marche avec aise celui qui est dans le monde en de plaisantes pensées
Il est dans le reflet avec aise celui qui s'anime dans la licorne
Elle concentre tant de symboles
Des symboles éclectiques, contraires
Tels des feuilles de papier
Par une magie invoquée par l'association des contraires
La licorne, et six dames
La licorne est en moi, cette blancheur de lumière
La dame, elle, tient le miroir, elle est la même, des deux côtés du miroir
Amaterasu elle aussi est la même, vue d'un côté par Izanagi qui la fait apapraître d'un miroir, et de nous qui la voyons dans le miroir offert à l'Auguste petit fils. Elle est dans l'intermédiaire, elle est la médiatrice.
N'est-ce pas ce qu'elles sont toutes ?
Pareilles en les deux mondes
Femmes magestueuses
Altesses
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